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« Le logement, absent du grand débat public », Henry Buzy-Cazaux, président de l’Institut du Management des Services Immobiliers.

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La communauté politique et la question du logement forment une union de circonstance, sans passion, sans enfant.

photo : Rpublique franaise

Avez-vous lu ou entendu dans les programmes des candidats à l’élection présidentielle quelque chose d’intéressant et d’original sur le logement ? Moi non. Deux enseignements : le premier, nos décideurs publics n’estiment pas que leurs « chers concitoyens » les attendent sur ce sujet ; le second – qu’on aurait pu prévoir – le débat pour l’accession à la  magistrature suprême, prélude aux législatives, se déroule sur fond d’annonces heureuses pour le marché du logement.

Dans ce contexte exceptionnel, même la très influente Fondation Abbé-Pierre a du mal à être audible, même les drames liés aux sans-abris n’ont pas l’écho qu’ils méritent.

Il faut s’attaquer aux problèmes de fond

C’est, à plus d’un titre, alarmant, mais il faut avoir le courage de constater et de traiter le mal. Car le préjudice est là : les questions de fond, éminemment politiques restent pendantes. Le marché va bien, certes : d’abord il pourrait aller bien mieux, avec plus de transactions, les projets des ménages satisfaits en plus grand nombre… ; ensuite, les taux d’intérêt exceptionnellement bas sont venus atténuer les effets néfastes de la cherté de la production des logements, de la fiscalité à tous les stades, des blocages liés à l’urbanisme en particulier.

De tout cela, on ne parle pas. L’insuffisance des terrains disponibles et constructibles à cause d’un régime fiscal qui favorise la conservation ? Silence. La TVA à 20 % sur un bien de première nécessité ? Tabou. Le poids insupportable des droits de mutation à titre onéreux ? Black out, ou démagogie sans explication quand un candidat de premier plan affirme vouloir les supprimer. Les droits de succession qui conduisent à céder tant ils sont lourds ? L’imposition confiscatoire sur la plus-value des biens locatifs et des résidences secondaires ? Nada. L’inflation des normes ? Rien de précis sur celles qu’il faut d’urgence supprimer. La hausse tendancielle des taxes foncière et d’habitation ? Omerta. Un patrimoine HLM trop abondant ici et insuffisant  là ? L’immobilier de l’État ? Chut ! Quelques cessions tonitruantes de joyaux parisiens tiennent lieu de bilan et de cap. L’aménagement du territoire et la fracture territoriale ? Pas un mot ou presque.

.

« Tout se passe comme si, structurellement et conjoncturellement, il n’y avait pas besoin de parler du logement. »

.

Parler d’une seule voix

Les corps intermédiaires ont-ils échoué dans leur mission de sensibiliser les politiques ? Oui, malgré leur travail. Les  discours des acteurs du neuf, de l’existant, du privé, du social, du très social, des professionnels et des consommateurs s’entrechoquent plus qu’ils ne se consolident. Une initiative en 2012, emmenée par la présidente du SNAL, avait fédéré toutes les organisations professionnelles ou presque, qui avaient parlé d’une seule voix ou en tout cas avec des voix concordantes devant tous les candidats, à la faveur d’un colloque géant à Paris. Trop rare.

On en redemande.

Et puis les politiques eux-mêmes doivent faire leur partie du chemin. Ils ne peuvent se contenter de s’exprimer lors des congrès auxquels on les convie et négliger ensuite les familles professionnelles. Quiconque a été maire doit considérer  qu’il détient les codes et les logiques. Si seulement ! Comment ignorer que le logement soit le souci majeur des Français ? Pas de travail sans adresse, pas de santé, pas de sécurité sans logement, enfin, pas de paix sociale sans  possibilité pour la Nation de se loger dignement.

On rêve que la communauté politique et la question du logement forment un couple soudé et fertile. Ils sont aujourd’hui dans une union de circonstance, sans passion, sans enfant. D’ailleurs, on compte les ministres qui auront aimé ce secteur et ils marquent les mémoires : ce n’est pas la moindre récompense qu’offrent les Français à ceux-là que de les faire entrer dans le patrimoine collectif. Vouloir passer à la postérité et laisser une trace plus qu’être élu ou plus qu’entrer au gouvernement.

 

Henry Buzy Cazaux

Après avoir conseillé Pierre Méhaignerie, ministre de l'équipement et du logement, Henry Buzy-Cazaux a occupé des fonctions de responsabilité dans des entreprises immobilières de premier plan, FONCIA, Tagerim ou encore le Crédit Immobilier de France, mais également au sein des organisations professionnelles du secteur. Ancien délégué général de la FNAIM, il a aussi été administrateur de plusieurs autres syndicats immobiliers. Il a été chargé de mission auprès du président du Conseil de l'immobilier de l'Etat.

Il mène depuis toujours une action engagée pour la formation aux métiers de l'immobilier: président d'honneur de l'Ecole supérieure des professions immobilières, cofondateur de l'Institut des villes, du territoire et de l'immobilier du Groupe ESSEC, il est aujourd'hui président fondateur de l'Institut du Management des Services Immobiliers, centre de prospective et d'enseignement.

Il est enfin membre du conseil scientifique de l'observatoire immobilier des notaires et président du groupe "Immobilier, logement et ville durable" du Forum pour la gestion des villes et des collectivités locales et territoriales.

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  • Par Tafani JP, il y a 7 années

    10 mesures pour revitaliser les centres des bourgs et des villes

    La loi sur l’architecture, les nouveaux PLU, le Grenelle de l’environnement les dispositions européennes en faveur de l’habitat ne sont actuellement pas assez utilisés pour cette cause qui prend une ampleur nationale sans précédent, dans un contexte culturel de plus en plus tendu. Ce phénomène n’est pas limité aux « quartiers prioritaires » !

    1- Faire le diagnostic du patrimoine architectural des quartiers centraux (et des abords, de la périphérie et de ses zones (ZA, ZI, Z ciale) en tenant compte des possibles dessertes ferroviaires ou aériennes, des circulations auto, cyclo, piétonnes avec l’assistance des C.A.U.E.
    2- Recenser les éléments « de caractère » des constructions d’habitation, de travail, de commerce, de prestige ou d’usage en mettant en valeur les éléments remarquables de manière formelle et indépendante.
    3- Unifier les « paysages » du centre urbain avec les (des) architectes (du patrimoine) sous forme de recommandations : toiture, façades, clôtures, menuiseries extérieures si possible dans le cadre du PLU
    4- Auditer l’évolution de la pression fiscale à venir en fonction des hypothèses de celles des revenus et des densités de population et recenser les possibles adaptations de logements, de bureaux et de commerces aux réalités ultralocales de la vie sociale. Evaluer l’impact et les flux de migrants et de mal logés (SDF inclus), suivre ou pas la proposition Fillon de PTZ+ en centre ville ?!
    5- Faire venir des créateurs au centre pour qu’ils s’expriment et proposent des solutions artistiques : 1% de la population pratique des métiers d’art, 1 % des budgets d’investissement pour des équipements publics pourrait être dédié à la création, anticiper les réflexions autour des services publics de proximité au su des nouvelles technologies : MSP et liens universitaires, covoiturage, plateforme technologique ou artisanale…bibliothèques improbables, liens entre générations et habitat médicalisé…
    6- Définir les « constructions types » vernaculaires « modulo » pour lesquelles un ensemble de matériaux d’isolation et de rénovation peut être défini sous la forme d’appels d’offres périodiques : kit isolation 100m2 avec et sans pose, dispositif d’autonomie énergétique unipersonnelle, …
    7- Associer les fournisseurs et les entreprises locales à la préparation des réponses adaptées à l’appel d’offres à venir pour obtenir des prix ultracompétitifs pour les kits et des systèmes d’apprentissage des métiers de la rénovation des constructions (CFA, Lycées, Centres d’insertion, formation continue…), étendre les bonifications éventuelles aux formes de garanties mutualisables.
    8- Faciliter la cession de « friches » à des personnes privées et des syndicats de copropriétaires (redonner vie aux sci à parts attributives ?!) ou à des associations par des collaborations entre les professionnels de l’immobilier et les collectivités locales en cherchant à valoriser au mieux le patrimoine rénové
    9- Faciliter la vie des commerces de centre ville et de centre bourg en proposant une signalétique harmonieuse et unifiée, en planifiant les modifications de structure permettant les accès /parkings automobiles (chargements-déchargements-livraisons), les accès aux personnes en situation de handicap, la cohabitation avec les animaux domestiques, la biodiversité (éclairages LED programmables, diminution des surfaces de vitres réfléchissantes…)
    10- Mettre chaque commune dans l’obligation de penser à son évolution (accès aux transports –en commun et de livraison-, logements, espaces verts, terres agricoles, terrains industriels, services numériques) sur 3 mandats par rapport à chacune des communes limitrophes et associer en son sein les représentants des quartiers et de l’agglo –ou de la Com Com !- les représentants des grandes surfaces et des associations culturelles et sportives, les parents d’élèves aux autorisations des aménagements périphériques ( des modifications du plan de circulation aux ouvertures de commerces et de services) et de rendre compte à la préfecture des situations (financières) des entreprises de commerce et de service de manière interactive avec une situation annuelle.
    A la manière de la Conférence annuelle agricole, la création d’une conférence annuelle de vie locale, laquelle pourrait être suivie d’un vote en cas de projets importants, a été envisagée. L’actuelle évolution des prix de l’immobilier, qui soit baissent en dessous du prix de la reconstruction de manière inquiétante dans plusieurs régions rurales ou qui montent au-delà des possibilités d’acquisition des salariés moyens dans plusieurs autres régions appellent des réponses différenciées mais centrées sur le développement CULTUREL.

    Références
    1- Inventing the European City Centre: Pedestrianisation Policies in Western Europe (1960-1980) https://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RHU_042_0099
    2- http://www.europe1.fr/emissions/le-zoom-eco/centre-ville-une-desertification-qui-saggrave-2959238
    3- http://www.corsematin.com/article/ajaccio/un-projet-europeen-pour-aider-a-reinventer-le-centre-ville
    4- Fin des PIC Urban en 2013 http://www.ville.gouv.fr/?programmes-d-aides-europeens
    5- FEDER etc http://www.ville.gouv.fr/?programmes-d-aides-europeens
    6- http://www.leblogpatrimoine.com/immobilier/prix-de-limmobilier-la-pierre-ne-vaut-plus-rien-a-cause-de-lobsolescence-immobiliere.html
    7- Cahors https://www.challenges.fr/france/comment-cahors-resiste-a-la-desertification-de-son-centre-ville_457359
    8- Les assises des Cœurs de Ville à Bercy fev 2017 http://proxy-pubminefi.diffusion.finances.gouv.fr/pub/document/18/22196.pdf
    9- Grande cause …européenne La gazette des communes 20 mar 2017 http://www.lagazettedescommunes.com/495248/la-metamorphose-des-centres-villes-est-en-route/
    10- SAM http://www.leberry.fr/saint-amand-montrond/economie/commerce-artisanat/2017/03/28/animation-et-publicite-les-propositions-des-commercants-pour-dynamiser-le-centre-ville_12339896.html

    Notes: Et non plus subventionner les diagnostics habitat ..dont on connait à l’avance le résultat désastreux !
    A 40000 euros la maison de ville de 80 m2 de type 2 4 pièces dans le Berry la Bourgogne, quand la construction d’un pavillon coûte 200 000€, il est urgent d’aider à mettre ces habitations à un niveau de confort – en particulier à les rendre faiblement dispendieuses en énergie- suffisant pour qu’elles restent attractives, sinon nombre d’entre elles seront abandonnées du fait des taxes locales en augmentation (acheminement électrique, ramassage des ordures ménagères, traitement individuel des eaux usées, taxe foncière)
    Ile de France, PACA, littoral, montagne touristique. Les prix de 6000 euros du m2 construit du fait de normes restrictives impliquent des prix de vente incompatibles avec le revenu médian, malgré les taux d’intérêt de 2017 quelle que soit la durée de l’endettement (7 à 35 ans).

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