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« La loi ALUR, machine à soutenir les prix du logement? », François Moerlen, Fondateur de Locagestion

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photo : François Moerlen, Fondateur de Locagestion

La baisse tant attendue est là: les prix des logements ont amorcé un mouvement qui ne peut que se poursuivre en 2014. L’ajustement du marché fait logiquement suite au décrochage historique ente la courbe du revenu des ménages et celle des pris de vente, intervenu entre 2000 et 2012.

Si on s’en réfère au tunnel de Friggit, l’ajustement devrait atteindre 35% sur une période de 5 à 8 ans pour retrouver un niveau conforme au rapport habituel entre ces deux statistiques. Cela confirme en tous points les prévisions de la FNAIM publiées en Janvier 2013, qui tablent sur une baisse probable des prix de l’ordre de 4% en 2014.

Mais tout cela était sans compter sur les effets de la loi ALUR, dont la mise en œuvre progressive devrait changer la donne. Cette loi, promesse du candidat Hollande lors de la campagne de 2011-2012, s’inscrivait logiquement dans une volonté de rendre du pouvoir d’achat aux Français, dans un contexte d’envolée des prix de l’immobilier.

Largement inspirée de la loi de 1948, ce projet devenu loi, devait permettre la baisse des prix des loyers en les encadrant, et la baisse des prix de vente en renforçant les droits d’occupation du titulaire du bail, tout en pesant sur le rendement de la pierre. Pour autant, 2014 n’est pas 2011, et le contexte à changé. Les grands principes de la loi ne risquent-ils pas, au contraire de limiter le mouvement de baisse des prix en cours?

L’encadrement des loyers, obstacle à l’ajustement du marché en période de déflation?

Au début des 30 glorieuses, la loi de 48 visait à protéger les locataires contre l’augmentation des loyers induite par une inflation galopante, et par le manque de logements dans les grandes villes, du fait de l’exode rural et des mouvements de population.

La loi ALUR consacre ce principe, sur la base d’un loyer de référence fixé par le Préfet, loyer auquel il sera possible d’appliquer une surcote de 20% sans aucun justificatif. Dès lors, on peut prévoir que les bailleurs demanderont l’application systématique du loyer médian majoré qui deviendra la norme, et constituera un prix plancher faisant obstacle à la baisse naturelle des prix de marché.

La GUL au secours de la rentabilité?

Voici un cadeau formidable aux bailleurs: le principe de la Garantie Universelle des Loyers institue une garantie gratuite de paiement des loyers au profit des propriétaires, sur la base du loyer de référence. Concrètement, elle couvrira au minimum 80% du loyer pour un montant maximum de 18 mois de loyers impayés, largement suffisant au regard des dettes locatives généralement constatées.

Il s’agit d’un dispositif avantageux pour le bailleur qui devait jusqu’à présent souscrire une assurance lui coutant environ 3% de ses revenus locatifs, et dont la couverture restait soumise à conditions. De quoi renforcer l’attrait dans le placement immobilier pour les investisseurs, et ainsi soutenir les prix.

Le droit renforcé de l’occupant, facteur de diminution de l’offre?

Corrélatif à la contrainte d’encadrement, le renforcement des droits de l’occupant vise à éviter un mouvement de défiance des propriétaires bailleurs qui souhaiteraient se désengager en vendant ou en retirant le bien de la location. Mais ce principe comporte un risque important: il fige le marché en incitant les locataires à se maintenir dans les lieux, et dissuade les propriétaires de mettre sur le marché de nouveaux biens à la location.

La loi ALUR, en instituant des droits nouveaux pour les conjoints, les ascendants et les descendants vivant dans le logement, en restreignant l’exercice du congé pour vente et pour reprise, notamment en cas d’achat d’un logement loué, aboutira à la diminution du nombre de biens mis en vente dans les zones tendues. Dès lors, le déséquilibre entre l’offre et la demande persistera, favorisant ainsi le maintien de prix élevés à la vente.

Car c’est bien le problème de la faiblesse de l’offre qu’il faut traiter en priorité. La forte contraction de la production de logements neufs en 2013 et les perspectives 2014 laissent augurer une diminution du nombre de logements à la location et à la vente dans les années à venir, d’autant que les investisseurs ne représentent plus que 25 000 ventes annuelles dans le cadre des lois de défiscalisation. Voici de quoi apporter de l’eau au moulin d’un pouvoir soudainement converti à la politique de l’offre.

L’effondrement du marché du neuf conjugué à un marché de l’ancien figé par les mesures d’encadrement de la loi ALUR, devraient ainsi produire les effets contraires de ceux escomptés, en freinant la baisse vertueuse des prix, amorcée en 2013.

Mais cela aura au moins une vertu politique: l’engagement d’inverser la courbe avant la fin de l’année, a dans ce domaine, de bonnes chances d’être tenu. © LeFildeLimmo/BazikPress

 

 

 

 

 

 

 

 

 

François Moerlen

François Moerlen est Président Délégué de la FNAIM (Fédération Nationale de l’Immobilier), en charge du développement numérique. Diplômé de l'Institut des Etudes Juridiques de l'Urbanisme et de la Construction, il est agent immobilier, administrateur de biens et syndic de copropriété à Toulouse. Fondateur de Locagestion, il a développé une solution collaborative de dématérialisation de la location, au service des agents immobiliers. Spécialiste de l’économie numérique appliquée au logement, il intervient sur le sujet de la transformation digitale des professionnels de l’immobilier (RENT, Congrès de l’Immobilier, Journal de l'Agence).

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