« Honoraires des syndics, mauvaise foi ou réalité économique », Jean-François Buet, Président de la FNAIM

L’encre de la loi ALUR n’est pas encore sèche que des esprits chagrins en imaginent la pire exploitation
de la part des syndics de copropriété. Ils profiteraient sans scrupule des changements de règles du jeu
pour augmenter leurs honoraires dans des proportions considérables.

Le sujet est important pour les quelque six millions de ménages qui vivent en copropriété et il mérite
des considérations claires, loin des procès d’intention dont telle association peu représentative a fait
son fonds de commerce.

Il faut d’abord relever une évidence : la loi ALUR accroît considérablement la charge des syndics. Ils
devront désormais établir et tenir à jour de nouveaux documents destinés à fournir aux copropriétaires
en permanence une meilleure connaissance de la situation de leur immeuble aux plans technique et
financier, tels la fiche synthétique de la copropriété, le diagnostic technique global ou encore le plan
pluriannuel de travaux. Au demeurant, ces documents seront transmis de façon systématique à tout
acquéreur. Les syndics devront aussi pourvoir à l’ouverture d’un compte séparé pour chaque
copropriété, ce qui va induire une multiplication de gestes comptables. En outre, ce compte pourra,
sur décision de l’assemblée générale, n’être pas tenu par la banque du syndic, ce qui ajoutera à la
complexité de l’affaire. Par ailleurs, l’instauration d’un fonds de travaux, que la FNAIM a appelé de ses
vœux, va également entraîner l’ouverture et la gestion d’un compte bancaire spécifique. Enfin, sans
être exhaustif des obligations introduites par le législateur dans l’ALUR, les syndics auront, à partir de
2016, à immatriculer les copropriétés dont ils sont mandataires et à transmettre pour chacune les
informations juridiques et financières essentielles à un établissement public désigné pour consigner
l’ensemble des données.

Bref, le périmètre de responsabilité des syndics augmente significativement. Dans le même temps, la
loi ALUR modifie leur mode de rémunération, imposant le forfait et réduisant les honoraires
complémentaires à une liste très limitative définie ultérieurement par décret. Contrairement à ce
qu’on a pu lire ici ou là, la proportion des honoraires exceptionnels n’est pas en moyenne de 60% ou
70%, mais de l’ordre de 10% à 30% de la facture globale, avec une grande disparité de situations. En
toute logique économique, les forfaits proposés par les cabinets vont, à l’avenir, tenir compte de la
perte de rémunération induite par la suppression de la plupart des options. Il appartiendra à chaque
professionnel avec chaque copropriété cliente d’analyser le montant des honoraires complémentaires,
par exemple lissé sur la durée du contrat précédent, et de mesurer l’évolution légitime du prix pratiqué
précédemment pour les seules prestations de base.

Pour une dernière raison majeure, crier au loup est déplacé: les contrats de syndic sont des contrats
négociés, non des contrats d’adhésion, et qu’il s’agisse de la prise en compte des nouvelles missions
ou du passage au forfait d’honoraires, les conséquences en seront débattues entre le professionnel et
le syndicat des copropriétaires en toute transparence. D’ailleurs, la même loi ALUR impose désormais
que les mises en concurrence soient systématiques : la liberté des copropriétaires sera moins que
jamais malmenée ou négligée.© LeFildeLimmo/BazikPress
Enfin, l’idée que des ententes s’organiseraient entre syndics pour parvenir à des augmentations
unifiées et forcément maximum est saugrenue: la France compte environ 15 000 cabinets de syndics,
loin de l’univers concentré d’autres secteurs dans lesquels des ententes ont parfois pu être dénoncées.
A l’inverse, le secteur de l’administration de biens souffre plutôt dans certaines villes du dumping et
de la vente à perte… Ceux qui nient la réalité économique des syndics et menacent ainsi l’existence
même du métier sont coupables de favoriser ces pratiques délétères, que la FNAIM traquera sans
relâche.

Ce sujet doit être regardé sereinement et en conscience. Les secteurs d’activité qui ont fait ce chemin
avant nous ont trouvé avec leurs clients le bon équilibre : par exemple, les véhicules sont désormais
livrés avec un niveau d’équipement bien supérieur à ce qu’il était il y a quinze ans, mais les prix de base
ont été grevés pour inclure les prestations supplémentaires sans que la santé de l’industrie automobile
en soit compromise. © LeFildeLimmo/BazikPress

jda: