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« Les courtiers sur le front de l’emprunt », Bruno Rouleau Président de l’APIC et porte-parole d’IN&FI Crédits

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Dans un contexte incertain, les courtiers en crédit se mobilisent pour être au plus près des clients et des agents immobiliers.

photo : courtiers

La production en trompe l’oeil des prêts immobiliers sur ces tout derniers mois ne reflète pas la réalité du terrain où le durcissement des conditions d’accès au crédit est une évidence quotidienne pour qui côtoie la transaction immobilière. La faute à la crise sanitaire qui a forcément refroidi quelques ardeurs ? Sans doute, mais pas que. Les critères du Haut Conseil à la stabilité financière (HCSF) qui, depuis midécembre 2019, a décidé de rappeler les banquiers à l’ordre devant l’emballement de l’endettement des ménages ? Oui, indiscutablement et d’ailleurs les effets n’avaient pas attendu le confinement pour impacter les accords des nouveaux dossiers en février et début mars derniers. Le taux d’usure ? Oui et oui, puisqu’on rencontre des situations ubuesques où des emprunteurs avec des revenus de 80-90 000 euros par an se retrouvent exclus du fait d’une assurance de prêt surprimée. La crainte des banques ? Oui aussi, car les conséquences de la crise sanitaire vont impacter la santé économique des entreprises et donc chahuter l’emploi. Du coup, plus que jamais, préparer un projet immobilier demande d’y consacrer un minimum de temps.  Pour le candidat à l’accession, évidemment, mais aussi pour le professionnel de l’immobilier afin qu’il sécurise la transaction et qu’il n’immobilise pas le bien inutilement, d’autant que la période reste très tendue du fait de la raréfaction des biens à vendre et de la bonne tenue des prix.

Les courtiers en crédit sont par essence agiles et souvent très en amont des  projets. Sécuriser le porteurde projet était déjà dans les habitudes avec des calculs d’enveloppe. Avec la hausse du ton entre certaines banques et les intermédiaires en crédit, la formalisation de la capacité d’emprunt est devenue la marque d’un engagement encore plus fort, mais aussi un signe de la volonté de soutenir le marché en fluidifiant les opérations. Comment ça marche et quelle légitimité donner à ces engagements ?

+20 à 25% de dossiers clients rejetés d’office

Les alertes lancées par les courtiers quant au taux de refus constatés depuis plusieurs mois ne se reflètent pas dans les statistiques de production publiées par la Banque de France.  A cela plusieurs raisons. Les lenteurs générées par le confinement ont gelé ou très fortement ralenti les demandes déposées par les clients depuis début mars. Par exemple, les dossiers de renégociation portés par les taux bas de fin 2019 sont parfois restés en attente de débouclage trois, quatre, voire cinq mois. De même, pour les dossiers d’investissement locatif sans caractère d’urgence. Et quant aux achats de résidences principales, les retards liés à la production de documents nécessaires à la mutation, l’embouteillage dans les études notariales et la difficulté à relancer les bureaux de publicité foncière et les services de l’urbanisme des municipalités, se sont ajoutés au traitement habituel et aux premiers départs en congés estivaux.

Mais si les Banques reconnaissent à présent une hausse modérée du taux de refus (environ + 12 % vs 2019 d’après la dernière publication de l’Observatoire du crédit aux ménages), ces données ne tiennent absolument pas compte du filtrage que les courtiers réalisent, du fait de leur maîtrise. Or, les principales enseignes de courtage se  rejoignent pour afficher une hausse des refus en première lecture des dossiers de l’ordre de 20 à 25 %, en sus du taux de rejet habituel.

Alors, certes, certains refus immédiats font l’objet d’un suivi qui permet d’apporter des solutions trouvées dans le cadre des conseils et de l’accompagnement, mais la réalité est là : ça passe moins facilement qu’avant !

Et ce n’est sans doute pas terminé. Car les banques, ayant résolu la question du coût de leur refinancement avec les dispositions prises par la Banque centrale européenne, redoutent une montée sensible, pour ne pas dire forte, du risque indirect de solvabilité, c’est-à-dire pour une question de défaillance, non du client directement mais, par ricochet, des employeurs. Et la liste des secteurs d’activité visés est longue…

Cette situation confine également les autorités de tutelle des banques à ne pas desserrer l’étau des normes et de la prudence. Malgré une confiance  maintenue des Français dans la pierre, la volatilité possible des prix conduit les banques à mettre la pression sur le montant de l’apport et sur le strict respect des critères prudentiels du taux d’endettement, faisant au passage fi du reste à vivre, tellement plus réaliste. Dès lors, les banques surenchérissent sur l’interprétation des textes ou des consignes, conscientes qu’en cas de difficultés éventuelles, leur « gendarme » ne leur passerait aucune excuse.

Le taux d’usure vite dépassé

Dernier élément de poids dans la période actuelle : le taux d’usure. Ce taux publié trimestriellement par la Banque de France, au-delà duquel une banque n’a pas le droit de prêter, prend en considération la moyenne des taux pratiqués par les grandes banques sur le trimestre précédent et y applique un bonus de 33 %. Mais cette marge de manoeuvre est forcément proportionnelle au taux de référence. Un tiers de 1 % ne donne pas d’évolution identique à un tiers de 2 %. Or les taux sont très bas. Et il s’agit des taux effectifs annuels globaux (TAEG), c’est-à-dire le taux nominal d’intérêt majoré des autres frais. Et comme les frais ont bondi, tant en termes de garantie (sociétés de cautionnement mutuel, souvent captives desdites banques) que de frais de dossier, en forte infl ation depuis fin 2019, la moindre surprime d’assurance suffi t à franchir le taux d’usure. D’autant que les critères du HCSF ont imposé aux banques de réduire les durées maximales, donc de mettre une pression sur le TAEG. La boucle est bouclée… Et des emprunteurs disposant de revenus confortables se retrouvent exclus de l’accès au crédit parce que leur santé leur joue des tours, ou qu’ils ont déjà réalisé un premier investissement locatif, dont les revenus fonciers ne sont pas retenus en totalité… sauf pour l’endettement.

Des règles de calculs complexes

Si le lien est si fort entre emprunt et acquisition, c’est que plus de 95 % des investissements locatifs se font au travers d’un crédit (pour des raisons avant tout fiscales car les intérêts sont déductibles des loyers encaissés mais aussi comme effet de levier du montant investi), et que ce taux dépasse régulièrement 80 à 85 % pour les résidences principales.

Envisager l’achat de son logement, c’est donc avant tout vérifier qu’on puisse obtenir le crédit permettant d’acquitter le prix du bien. Au-delà du simple respect des 33 % d’endettement que l’on a évoqué, les règles de calcul des banques sont complexes à appréhender pour qui ne les maîtrise pas. En effet, comment comptabilise-t-on les primes, les parts variables, les allocations familiales… ? Et si je suis chef d’entreprise ou indépendant, quels sont les résultats retenus : moyenne sur trois ans, plus bas des cinq dernières années… ? Tout comme le sujet des apports ou des autres opérations pouvant être considérés comme de l’apport. Qui comptabilise quoi, comment et pour combien ?

Sollicité, le conseiller bancaire peut répondre à beaucoup de questions, mais il restera l’ambassadeur de la stratégie et des produits de son employeur. Recourir à un courtier en crédits, c’est vérifier un grand nombre d’offres existant sur le marché du moment, c’est optimiser le montage de son dossier, y compris en allant empiler des prêts complémentaires (prêts patronaux, prêts aidés des collectivités, voire prêts des caisses de retraite ou des mutuelles professionnelles…), et surtout réduire au mieux le coût total de l’opération. Bien sûr, on pense au pouvoir de négociation auprès de la banque, mais c’est plus souvent en préconisant un montage avec des garanties
possibles moins onéreuses, en retenant des options permettant d’accélérer le remboursement du prêt, ou en négociant les indemnités de remboursement anticipées en fonction des projets futurs. Et sans parler du sujet des assurances de prêt adaptées à la situation de l’emprunteur et à ses projets, si nécessité d’y prendre spécifiquement garde. Le tout, dans le cadre d’un accompagnement plus étroit, une disponibilité et un confort de suivi du projet.

Des capacités d’emprunt formalisées

Les courtiers ont bien compris que, dans cet environnement très incertain et encore plus anxiogène, le porteur de projet a besoin d’être rassuré, conforté dans sa décision. Ces calculs d’enveloppe auxquels ils sont rôdés sont déjà de nature à sécuriser le consommateur, mais aussi à accompagner leurs partenaires agents immobiliers car les enjeux sont aussi importants pour eux en cette période de tension et de rareté des biens à vendre. C’est à la fois un sujet de qualité de prestation pour les acheteurs et les vendeurs, mais également de crédibilité pour le débouclage rapide de la transaction et, bien entendu, financier pour accélérer l’encaissement des honoraires.

Par ailleurs, les évolutions technologiques, avec les requêtes informatiques auprès des administrations, les agrégateurs de comptes et autres accès autorisables aux fichiers des locataires, accélèrent la gestion des données et fiabilisent les informations. De la sorte, le courtier se rassure sur la précision des éléments du calcul d’endettement et l’automatise de plus en plus. Ainsi, le passage d’un simple calcul à l’édition d’un « passeport »* pour emprunter s’est fait tout naturellement, avec édition d’un support marketé, mais s’il ne garantit pas l’octroi final du prêt par le financeur, il permet à tous les acteurs concernés de se rassurer sur le sérieux du projet et de s’engager dans leurs missions respectives. Sans compter que l’aspect psychologique pour le candidat à l’achat est essentiel, tant la tentation de reculer, au regard des enjeux financiers et de temps, peuvent impressionner.

Le courtier en crédit immobilier n’est pas qu’un chasseur de taux, c’est avant tout pour le consommateur et pour le professionnel de l’immobilier un appui et un coach de solutions financières. Bref, un partenaire fiable sur lequel chacun peut compter en ces temps particulièrement troubles que nous traversons.

*Passeport Emprunteur© chez Vousfinancer.com (réactivation d’une initiative lancée après la crise financière de 2012) ; Visa pour le crédit© chez Meilleurtaux.com, et autres Passeport crédit© chez Finances Privées ; Permis de crédit© chez IN&FI Crédits, sans compter des appellations plus simples chez d’autres.

Bruno Rouleau

Bruno ROULEAU ex Président de l'APIC. Diplômé du CNAM dans le domaine bancaire, il a exercé durant 20 ans au sein de 4 groupes bancaires, où il a occupé toutes les fonctions opérationnelles sur les marchés du Particulier, du Professionnel et des PME. Il a ensuite rejoint l’enseigne de courtage en crédits In&Fi Crédits pendant 5 ans, avec la fonction de Directeur Associé, en charge de la Formation, de l’Assistance et des Partenariats, et a créé In&Fi Crédits Pro et l’IFIB (Institut de Formation des Intermédiaires de Banque) aux côtés de Pascal BEUVELET. En 2010, il rejoint le Comité de Direction Générale, puis le Comité Exécutif de CAFPI, en charge des Grands Accords commerciaux du groupe et de l’Organisation Interne. Il a créé MUTANS CONSULTANTS en septembre 2015, cabinet de formation et de conseil qui accompagnait les entreprises et les réseaux dans leur virage digital, et notamment pour optimiser leur mutation dans la gestion de la Relation Client. Revenu dans le monde du courtage en 2018, il a d’abord retrouvé IN&FI Crédits comme Directeur des Partenariats et porte-parole, avant de passer chez La Centrale de Financement comme Secréta ire Général, et est désormais porte-parole et Directeur de la Stratégie et de l’Innovation chez AFR Financement.

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Vos réactions
  • Par leconomizeur, il y a 3 années

    Franchement je ne vois pas l’intérêt du passeport crédit.. Il ne garanti pas l’obtention d’un prêt, le courtier est un intermédiaire utile mais ce n’est pas lui qui débloque les fonds du financement.
    Le courtier avec son expérience peut déterminer disons une probabilité de réussite . Il ne faut pas oublier que la politique d’une banque peut changer du jour au lendemain , jusqu’à l’édition des offres de prêt, il peut y avoir des mauvaises surprises.
    Un dossier qui respecte l’endettement, le reste à vivre et qui ne présente pas de saut charges à toutes chances d’aller au bout. Il y certes des situations illogique lié au taux d’usure, ou encore au mode de calcul de l’endettement. mais pour une majorité de dossiers les règles en vigueur permettent encore l’accession au crédit.
    Il ne faut pas oublier qu’il existe aussi des organismes certes un peu plus cher mais avec d’autre facilités d’octroi. Ne pas se décourager avec un ou deux refus, le projet peut être bon mais ce n’est juste pas la bonne banque pour ce projet.

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