La dépendance de l’immobilier à l’argent public
Les débats budgétaires et la situation financière de notre pays illustrent une triste réalité : avec 54% du PIB consacré aux dépenses publiques, nous bénéficions tous, directement ou indirectement, de cette manne. Une certaine dépendance à l’argent public s’est installée, et le secteur du logement n’y échappe pas.
Nous avons mobilisé des dizaines de milliards d’euros pour des dispositifs comme le bouclier tarifaire, bénéficié de la TVA réduite sur les travaux dans le bâtiment, et profité de lois de défiscalisation et de prêts à taux zéro pour soutenir le secteur de la construction. L’immobilier reste toutefois contributif aux finances publiques, même après la suppression de la taxe d’habitation.
Depuis près de deux ans, le secteur locatif et la construction réclament un soutien financier, notamment avec la création d’un statut pour les bailleurs, sur lequel j’ai travaillé.
Lorsque le marché de la transaction a fortement chuté, les acteurs du logement n’ont cessé d’interpeller le gouvernement.
Il existe un paradoxe : une activité reposant sur le secteur privé reste dépendante d’une forme de perfusion publique. Cette logique reflète une conception d’un État omnipotent, mais elle n’est ni durable ni efficace.
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Réglementation et blocages
Le marché du logement a été soumis à une réglementation croissante, parfois au détriment du droit de propriété. On pense à la limitation des résidences secondaires, à l’autorisation préalable de mise en location, à l’encadrement des loyers, ou encore à l’interdiction de louer certains logements énergivores mais confortables.
Côté construction, l’obligation de produire des logements sociaux alourdit les coûts pour l’accession libre. Les droits à construire sont souvent sous-exploités par des élus frileux. Certains ont annulé des permis en prétextant la pénurie pour justifier l’encadrement des loyers.
Le ZAN (Zéro Artificialisation Nette) fige la France construite, créant à la fois pénurie et rente pour les propriétaires. Résultat : une machine qui se grippe, malgré des intentions souvent louables.
Leçons à tirer de la crise
Le secteur locatif offre un exemple parlant. L’arrivée d’Airbnb en France a coïncidé avec la loi ALUR et une réglementation accrue des locations nues. La plateforme a apporté liberté et rendement aux bailleurs, tout en maintenant une qualité de service via la notation par les locataires.
La location meublée, en plein essor, illustre le désir de liberté des bailleurs. Le marché de l’ancien, quant à lui, a subi une forte contraction depuis 2022, due à la hausse des taux, à la perte de confiance et au contexte international anxiogène. Son redressement progressif, soutenu par la baisse des taux et des prix, montre le fonctionnement classique d’un marché libre.
Certains plaident pour l’intervention de l’État sur le logement, considéré comme un besoin primaire. Mais la valeur patrimoniale d’un bien ne peut être décrétée par la puissance publique sans nuire aux propriétaires. Une régulation excessive conduit également à une hyper-réglementation des intermédiaires et freine l’investissement immobilier.
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Une nouvelle vision pour le logement
La clé du logement des Français réside dans le marché locatif. L’accès à la propriété se fait plus tard et la mobilité est un facteur d’emploi.
Il est temps de remplacer le triptyque « hyper réglementation, subvention, défiscalisation » par un triptyque « déréglementation, contrôle, statut économique unifié des bailleurs ».
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Déréglementation : liberté des loyers, liberté des usages, bail d’un an renouvelable, préavis général de 6 mois pour les bailleurs et 3 mois pour les locataires, causes de résiliation limitées (reprise pour habiter, vente, décès).
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Réglementation : décence des logements, charges récupérables, indexation des loyers.
Cette approche redonnerait liberté et liquidité à l’investissement immobilier, créant un choc d’offre sans coût pour les finances publiques, et favorisant la fluidité du marché ainsi que le contrôle des loyers.
Conclusion
Je sais que ces propos susciteront au mieux un sourire aimable, au pire beaucoup de sarcasmes. Mais la politique se pense sur le long terme, et les effets de balancier existent. Comme l’écrivait Frédéric Bastiat (1) :
« La doctrine qui place la force motrice de la société non dans la généralité des hommes et dans leur organisation propre, mais dans les législateurs et les gouvernements, a des conséquences plus déplorables encore… Si ce moteur n’est pas bon, il faut le briser, et en choisir un autre. »
1 Frederic Bastiat (1801-1850) économiste, philosophe et homme politique, considéré comme l’un des pères de la pensée libérale française.

