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« Baromètre LPI-SeLoger mai 2021 : Impact limité du 3ème confinement », Michel Mouillart

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Avec la mise en œuvre du 3ème confinement, le regain de la demande constaté en mars s’est émoussé. Certes, l’activité n’a pas reculé aussi brutalement que lors des précédents confinements : une baisse des ventes de 18 % en avril 2021, contre 76 % en avril 2020, puis de 28 % en novembre. L’analyse de Michel Mouillart, professeur d’Economie à l’Université de Paris Ouest et porte-parole du baromètre des prix immobiliers LPI-SeLoger.

marché immobilier 2023

Poursuite de la hausse des prix des logements anciens

Le ralentissement constaté durant le 2ème confinement s’était conjugué avec le repli saisonnier habituel des prix des logements anciens observé durant les mois d’hiver. Mais à partir de mars, leur progression a repris à un rythme soutenu : et en avril, l’augmentation sur 3 mois a été de 2.7 %, pour l’ensemble du marché. Aussi, l’accroissement annuel est maintenant de 5.0 %. La hausse reste donc rapide, en dépit d’un nouvel affaiblissement des prix provoqué par le 3ème confinement.

Ce sont les prix des appartements qui enregistrent la progression la plus rapide, avec une hausse de 5.2 % sur le seul mois d’avril. L’augmentation mesurée sur 3 mois est ainsi de 3.4 % : les conséquences du repli des prix provoqué par le blocage du marché dans les grandes villes durant le 2ème confinement se font encore un peu ressentir, en dépit d’un rebond sensible en mars. Néanmoins, les prix d’offre des vendeurs poursuivent leur redressement et l’augmentation des prix signés se renforce : + 3.0 % sur 3 mois, une telle poussée ne s’était pas constatée depuis 2011, lorsque la demande bénéficiait pleinement du soutien d’un PTZ sans travaux, ni conditions de ressources.

En revanche, après les augmentations rapides des derniers mois, les prix des maisons progressent beaucoup plus lentement : + 1.6 % sur 3 mois. Le ralentissement est donc sensible. La pression d’une demande qui exprime traditionnellement sa préférence pour ce type d’habitat semble s’estomper, en dépit d’une nouvelle amélioration des conditions de crédit (taux et durée) proposées par les banques. D’ailleurs, les prix affichés n’augmentent quasiment plus.

Nouvelle baisse des prix des logements neufs

Depuis le début de l’année, la tendance baissière des prix des logements neufs s’est installée. Elle est la plus vive sur le marché des maisons, avec – 5.2 % sur 3 mois, contre – 0.5 % sur celui des appartements. Ainsi, avec une hausse de 1.4 % sur un an, les évolutions observées sur le marché des maisons tranchent avec celles constatées il y a quelques mois encore. En dépit du rebond de la demande, l’offre nouvelle s’adapte aux contraintes budgétaires des ménages qui réalisent leurs projets sur ce marché. Par contre, la progression des prix des appartements reste soutenue, avec + 3.8 % sur un an. Habituellement, les promoteurs évitent de baisser les prix des logements commercialisés, préférant accompagner la vente d’un « geste » commercial (une cuisine équipée, par exemple).

Pas de pause pour la hausse des prix dans les grandes villes

Dans 75 % des villes de plus de 100 000 habitants, la hausse des prix des appartements anciens est toujours d’au moins égale à 5 % sur un an (65 % des villes de plus de 50 000 habitants) : elle est même d’au moins 10 % dans 30 % des grandes villes.

Parmi les villes avec une hausse des prix d’au moins 10 %, on trouve beaucoup de villes moyennes où les prix ne dépassent guère les 2 000 €/m² : Cholet, Evreux, Montauban, Saint Quentin ou Troyes, par exemple ; mais aussi et toujours Mulhouse. De telles hausses se constatent aussi dans beaucoup de grandes villes, centres d’espaces métropolitains : Lille, Nantes, Rennes et Strasbourg. Ainsi, si le niveau des prix reste le plus élevé sur Paris et sa 1ère couronne, les hausses de prix les plus rapides se rencontrent en Province.

Quant à Paris, le rythme de la hausse s’est ressaisi en avril : avec + 4.6 % sur un an. D’ailleurs, sur les 3 derniers mois, l’augmentation a été de + 3.1 % : l’affaiblissement de la fin 2020 qui conjuguait creux saisonnier et impact du 2ème confinement semble oublié. Dès janvier dernier, ce ressaisissement se constatait déjà et en avril, les prix progressent de 5.0 % sur un mois. Dans 11 des 20 arrondissements parisiens, les prix dépassent maintenant les 11 000 €/m². Et une augmentation de plus de 10 % sur un an s’observe dans 2 des arrondissements les plus chers (1er et 4ème).

Impact limité du 3ème confinement

Avec la mise en œuvre du 3ème confinement, le regain de la demande constaté en mars s’est émoussé. Certes, l’activité n’a pas reculé aussi brutalement que lors des précédents confinements : une baisse des ventes de 18 % en avril 2021, contre 76 % en avril 2020, puis de 28 % en novembre. La demande a en effet pleinement bénéficié d’une l’amélioration exceptionnelle des conditions de crédit (taux et durée), même si la demande reste bridée par le resserrement de l’accès au crédit décidé par la Banque de France. Et les conditions du 3ème confinement n’ont pas été aussi rudes que celles des deux précédents.

Dans ces conditions, l’activité du marché de l’ancien mesurée en niveau trimestriel glissant a bondi de 38.9 % en avril, en glissement annuel. Mais comme le marché avait été fortement impacté par le 1er confinement, cette progression ne signifie pas, et loin de là, que les ventes réalisées depuis le début de l’année 2021 ont retrouvé leur niveau d’avant la crise : elles sont de 13 % inférieures à ce qu’elles étaient en 2019 à la même époque. Elles viennent juste de retrouver leur niveau des premiers mois de 2015 !

Lent repli des marges en avril

En avril 2021, France entière, la marge de négociation s’est établie à 3.9 %, en moyenne : 3.4 % pour les appartements et 4.3 % pour les maisons. Après plusieurs mois d’érosion, les marges ont encore lentement reculé en avril : elles se situent à 15 % sous leur moyenne de longue période. Alors que l’offre de biens disponibles à l’achat s’est nettement contractée depuis un an, la pression sur les prix n’est toujours pas retombée : et les prix signés augmentent nettement plus rapidement que les prix affichés.

Les marges restent les plus faibles dans les régions où les marchés sont particulièrement déséquilibrés (Ile de France et Rhône-Alpes), mais aussi sur la partie du littoral atlantique (Bretagne et Aquitaine) qui bénéficie d’un regain d’attractivité depuis plus d’un an, sans oublier les territoires en bordure de la Manche (Haute Normandie, voire une partie du Nord-Pas de Calais) ou ceux que la demande redécouvre (l’Auvergne, par exemple).

Reprise générale du marché

Aucune région n’est restée à l’écart du rebond des ventes de logements anciens constaté depuis mars dernier. Même celles où se constataient encore certaines hésitations de la demande en mars bénéficient maintenant du redressement du marché : telles l’Alsace, la Lorraine ou le Nord-Pas de Calais, par exemple. En dépit du relèvement des exigences en matière d’apport personnel, l’amélioration des conditions de crédit a largement facilité le relèvement de la demande, même celle des ménages modestes.

Les hausses d’activité ont été les plus rapides (au moins 40 % sur un an) dans les régions où le choc du 1er confinement avait été le plus rude : en Aquitaine, en Ile de France, en PACA et en Rhône-Alpes. Mais aussi dans celles qui ont bénéficié d’un fort rebond de l’accession en maison individuelle : en Bourgogne, en Bretagne, en Franche Comté, dans le Languedoc-Roussillon ou en Haute Normandie.

La reprise est la moins rapide (de l’ordre de 20 % sur un an) en Alsace, en Lorraine, dans le Nord-Pas de Calais et en Picardie : sur des territoires où la dégradation de la situation économique et sociale a nettement renforcé les conséquences du resserrement de l’accès au crédit. Ailleurs l’augmentation des ventes est de l’ordre de 30 % sur un an.

Hausse des prix des appartements dans toutes les métropoles

L’augmentation des prix des appartements est générale. Elle reste la plus rapide (au moins 9 % sur un an) à l’Ouest (Brest Métropole, Nantes Métropole et Rennes Métropole) et sur l’Eurométropole de Strasbourg. Dans tous les cas, la hausse concerne l’ensemble du territoire métropolitain : la pression de la demande n’a pas été altérée par la crise sanitaire et ses conséquences économiques et sociales et sur des marchés en situation de pénurie, les tensions se sont largement diffusées dans les communes adjacentes (renforcement de la préférence de la demande pour un habitat individuel). En revanche, les hausses sont les moins rapides (4 % sur un an) sur Bordeaux Métropole et sur Grenoble-Alpes-Métropole, en raison d’un affaiblissement de l’accroissement des prix sur la ville-centre et du déplacement de la demande vers la périphérie.

En dépit de l’évolution rapide des prix des maisons constatée par le passé, les augmentations récentes restent soutenues dans la plupart des métropoles. La hausse des prix des maisons est rapide (de l’ordre de 8 % sur un an) sur les métropoles d’Aix-Marseille-Provence, de Brest et de Lyon : sur la métropole d’Aix-Marseille-Provence, l’augmentation des prix des maisons est nettement plus forte en périphérie que dans la ville-centre, illustrant le déplacement de la demande ; alors que sur les deux autres métropoles, la pression de la demande s’est encore renforcée sur des marchés de pénurie. Par contre, les prix des maisons reculent toujours sur Grenoble-Alpes-Métropole et sur l’Eurométropole de Strasbourg.

 

 

 

Michel Mouillart

Michel Mouillart est Professeur émérite à l’Université et FRICS (Fellow de la Royal Institution of Chartered Surveyors). Il est Docteur d’Etat en Economie et Docteur sur travaux en Economie et Financement du Logement.

L’essentiel de son action dans le secteur du logement a consisté en la réalisation d’études et de recherches sur le secteur de l’immobilier résidentiel. Il a ainsi mis en place ou contribué au développement de nombreux observatoires qui ont trouvé leur place dans le système d’informations sur le logement privé en France. Il assure la direction scientifique de ces observatoires : les crédits aux ménages (Fédération Bancaire Française) depuis 1989, les loyers du secteur locatif privé (CLAMEUR) de 1998 à 2019, la production de crédits immobiliers aux particuliers (Observatoire de la Production de Crédits Immobiliers) depuis 1999, l’accession à la propriété (Institut CSA) depuis 1999, l’Observatoire Crédit Logement/CSA depuis 2007 et l’Observatoire LPI sur les prix des logements neufs et anciens depuis 2011.

En tant que personnalité qualifiée, il a été nommé et il siège au Conseil National de l’Habitat depuis 1990. Il a ainsi été Président de nombreux groupes de travail du Conseil National de l’Habitat, dont récemment le groupe « Redynamiser l’accession à la propriété » (2023). Il avait aussi été rapporteur des « Rencontres ConstructionAménagement du Territoire » de l’Assemblée Nationale de 1989 à 2001.

Par ailleurs, et toujours en tant que personnalité qualifiée, il a été membre du Conseil National de l’Information statistique (1991-2000), de la Commission des Comptes du Logement 1992-2014) et de l’Observatoire National de la Pauvreté et de l'Exclusion Sociale (2006-2013). De même, il a été Administrateur de l’Office HLM de la ville de Nanterre (1983-2014) et de la Fédération Nationale Habitat et Développement (2008- 2015).

Depuis 2010, il est membre du Conseil de Développement du Pays de Brest, toujours en tant que personnalité qualifiée. Et depuis 2015, il est administrateur de SOLIHA-Finistère.

Auteur régulier de nombreux articles dans des revues scientifiques ou professionnelles, il a publié ou participé à la publication de nombreux ouvrages sur l’économie et le financement du logement.

Il est par ailleurs Chevalier de la Légion d’Honneur et Chevalier dans l’Ordre National du Mérite.

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