«Nos craintes portent sur la fiabilité du nouveau DPE », Interview de Danielle Dubrac présidente de l’UNIS.

En cette rentrée, l’UNIS est sur le qui-vive. Le syndicat immobilier, qui regroupe 2200 entreprises adhérentes, est mobilisé pour participer aux débats autour, entre autres, de la Loi « Climat et Résilience » et du nouveau DPE. Les explications de Danielle Dubrac, sa présidente.

Quel est le moral de vos adhérents en cette rentrée ?

Leur moral est bon car les transactions restent nombreuses, du fait des mobilités qu’offrent les nouvelles conditions de travail. Pour autant, il n’est pas euphorique. Ils sont encore relativement contraints par le contexte sanitaire, qui rend difficile cette rentrée. Sur le sujet des assemblées générales de copropriété par exemple, ils sont coincés : s’ils exigent le passe sanitaire, ils excluent des copropriétaires. Mais, s’ils ne le font pas, ils risquent une amende.

En parallèle, ils ont plusieurs sujets en tête dont la Loi « Climat et Résilience » Celle-ci devrait impacter leurs activités de transaction et de location, puisqu’elle prévoit d’interdire, d’ici 2023, la location des logements les plus énergivores. Or, ils représentent encore 25 % du parc locatif privé. S’ils ne sont pas rénovés, ils sortiront du parc, entraînant une chute de l’offre de 90 000 logements d’ici 2023 et 2 millions d’ici 2028.

Quels sont les impacts du nouveau DPE, pivot de la loi « Climat et Résilience », qui vise à éradiquer les « passoires énergétiques » ?

Nos craintes portent sur la fiabilité de ce nouveau diagnostic. Avec notre partenaire la FIDI (Fédération interprofessionnelle du diagnostic immobilier), nous regrettons qu’il n’y ait pas eu un délai de test entre la disponibilité des logiciels de diagnostic en mai 2021 et la date d’application du 1er juillet 2021. Nos premiers retours nous laissent penser que les logiciels sont encore en période de rodage et réalisent des estimations sur-évaluées. Lorsque des informations sont manquantes, par exemple sur l’eau chaude sanitaire ou les auxiliaires de ventilation, le logiciel met, par défaut, la note la plus défavorable. Certains logements se retrouvent ainsi déclassés. Nous recommandons donc aux professionnels de l’immobilier qui seraient concernés de refaire un nouveau DPE d’ici trois mois. Et aux propriétaires de s’intéresser à « la valeur verte » de leur logement, qui va impacter leur prix.

Comment se déroulent les AG de copropriété, maintenant qu’elles peuvent de nouveau se tenir en présentiel ?

La tenue des AG est rendue difficile par le contexte sanitaire. C’est la raison pour laquelle elles ont été autant décalées en 2020. Même si, depuis le 9 juin dernier, elles peuvent se dérouler en présentiel, une jauge de 4 m2 par personne doit être respectée. Nous réfléchissons à lever cette jauge, en imposant le passe sanitaire, même si cette option n’est pas entièrement satisfaisante. En août, la possibilité de tenir des AG à huis clos a été prorogée jusqu’au 30 septembre 2021. C’est une échéance que nous ne voulons pas voir repoussée. Car avec le vote par correspondance, les copropriétés ne prennent aucune décision qui ne soit pas urgente. Cette modalité à distance n’apporte aucune convivialité : les copropriétaires ont besoin de se réunir autour d’une table pour échanger. Ils ne votent pas des travaux de rénovation simplement en cochant les cases d’un formulaire.

Quel sera le programme de votre prochain congrès, du 13 au 15 octobre prochains ?

Le thème de notre congrès sera : « Responsable, Solidaire, Engagé : l’immobilier au cœur de la société ». Nous présenterons notamment un manifeste à destination des candidats à la présidentielle. Il fera quelques préconisations pour construire encore plus de logements. Il portera également sur le pouvoir d’achat des ménages, qui a été fragilisé par la crise sanitaire, mais aussi sur l’évolution de la profession immobilière. Nous réfléchissons par exemple à l’élaboration de programmes de formation courts et fiables, qui répondraient à un besoin du terrain, notamment des mandataires, qui pourraient ainsi monter en compétences. Nous réfléchissons également à la notion de formation « tout au long de la vie », en se penchant notamment sur un droit à la formation qui pourrait être différé. Le congrès fera enfin la part belle à la rénovation énergétique, qui est un enjeu essentiel pour l’UNIS.

À quels sujets l’UNIS sera-t-elle particulièrement attentive ces prochains mois ?

En cette rentrée, plusieurs sujets font l’objet d’une attention particulière. Le projet de loi désormais appelé 3DS relatif à la décentralisation en est un. L’UNIS réfléchit à soumettre des propositions afin de relever le taux de constructibilité de certaines zones et de transformer des bureaux vacants en logements. Nous militons également pour que le statut de bailleur privé soit reconnu comme le producteur d’un bien de première nécessité. Nous estimons en effet qu’il a un rôle d’intérêt général face à la fragilisation des conditions de logement. Ce statut consisterait à donner des avantages fiscaux aux propriétaires qui s’engagent à louer leur logement en dessous du prix du marché. Enfin, nous sommes chagrinés par la poursuite de l’expérimentation de l’encadrement des loyers : nous aurions trouvé plus judicieux de faire un premier bilan de la mesure à Paris et Lille avant de la voir concerner d’autres métropoles comme Lyon.

 

Propos recueillis par Aurélie Tachot

 

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