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« Relancer la construction de logements collectifs : les pistes à explorer », le Club des Penseurs AVIV-Seloger

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Il faut remonter à 2008 pour trouver une situation de production et de vente aussi faible. Relancer la construction de logements collectifs devient urgent. Le Club des Penseurs AVIV-SeLoger ouvre le dialogue et formule des solutions concrètes.

construction de logements

Pour ce nouveau débat, les penseurs se sont penchés au chevet de la promotion résidentielle, un choix de thème formulé alors même que les derniers chiffres du secteur n’étaient pas encore parus : “ L’année 2023 a très mal commencé. Si les tendances de la fin 2022 (baisse de près de 40% des ventes dans le collectif neuf) se confirment et s’installent dans la durée, nous connaîtrons une année désastreuse; 56 000 logements neufs collectifs ne seront pas construits en 2023, aboutissant à la destruction de plus de 100 000 emplois et à l’accentuation du déficit de logements nécessaires pour répondre aux besoins des Français” constate Didier Bellier-Ganière, Délégué Général de la FPI.

Tous les indicateurs les plus récents sont au rouge

  •  La moyenne des autorisations mensuelles de logements collectifs, à 17794, depuis les dernières élections de 2020 reste bien inférieure à celle constatée sur 10 ans avant cette échéance, qui était à 19098 unités. L’offre s’étiole.
  • Les mises en vente en 2022 (98081 unités) affichent une baisse de près de 8% par rapport à 2021, rejoignant ainsi la contre performance de l’année covid de 2020.
  • Les ventes effectives, elles, sont en chute libre, accusant une baisse en 2022 de près de 25% (121875 logements). Cette moyenne annuelle cache en outre une dégradation au dernier trimestre de 2022, qui donne le la de 2023 : le dernier trimestre de l’année dernière a accusé une baisse de 36,3% des ventes.

 Des causes multiples pour endiguer le problème

 Le diagnostic est établi et partagé entre tous les observateurs présents au débat.

Les causes de cette situation sont multiples, pour certaines anciennes et structurelles, pour d’autres relevant des dérèglements économiques du moment: :

  • La suppression de la taxe d’habitation,
  • L’objectif de « zéro artificialisation nette » en 2050,
  • Le prix du foncier,
  • La crise de confiance de l’opinion, qui empêche les ménages de se projeter et de s’engager dans des opérations d’acquisition à long terme, portées par un endettement de 20 ou 25 ans,
  • Le conflit géopolitique russo-ukrainien et la crainte de son extension, l’inflation, l’accès au crédit durci, avec le triptyque explosif coût majoré du crédit-taux d’usure-critères restrictifs du HCSF (Haut conseil de stabilité financière), voilà l’équation du logement en ce début de 2023.

Des solutions d’urgence et le besoin de repenser la promotion à long terme

Des remèdes sont à administrer dans l’urgence, sans perdre de vue la nécessité de traiter des difficultés plus structurelles. Fort de l’exemple de certains leaders, il est indispensable d’accompagner l’ensemble des acteurs de la promotion pour tous les faire entrer dans la transition écologique. Ces perspectives ont guidé la réflexion du Club des penseurs AVIV.

Les moyens pour remédier à la désolvabilisation des ménages :

  • assouplir les critères prudentiels du HCSF, en particulier en donnant aux banques la possibilité de déroger aux taux d’effort maximum de 35%, ou en leur conférant la faculté de sortir des critères pour une proportion de crédits supérieure aux 20% actuellement autorisés de la production trimestrielle.
  • suspendre le recours au taux d’usure pendant la période de forte inflation des taux, (ou au moins pérenniser la mensualisation du calcul de ce taux au-delà de juillet 2023)
  • proroger le prêt à taux zéro au-delà de l’échéance de la fin de 2023, et l’assouplir en termes de zonage (notamment en entrant dans une logique de projets en accord avec les maires)
  • bâtir un statut fiscal stable de l’investisseur privé dans le neuf avec un amortissement puissant de 5% par an pendant vingt ans.
  • permettre la déductibilité des intérêts d’emprunt des crédits immobiliers.
  • exonérer de droits de mutation sur les dons d’argent jusqu’à 150 000 € aux descendants destinés à l’acquisition d’un logement neuf.
  • ne pas réduire la TVA sur le logement neuf, pour éviter l’effet inflationniste prévisible sur le foncier.

Lever les freins à la construction

  • conduire les maires à exploiter la totalité des facultés de construction des plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUI) ( aujourd’hui utilisés en moyenne à 65% seulement)
  • imposer des servitudes de densité minimale pour aider les maires à faire accepter par l’opinion la densification.
  • contrôler la légalité des chartes communales s’ajoutant aux règles d’urbanisme des PLUI.
  • permettre la réversibilité des permis de construire, pour donner de la plasticité aux projets.
  • faciliter par tous moyens utiles la transformation des bureaux en logements, en incitant les maires à identifier les locaux tertiaires obsolètes ou vacants et à autoriser leur mutation.
  • rendre anonymes les demandes de permis de construire, qui pénalisent les ménages désireux de faire construire des maisons individuelles.
  • contraindre encore plus les délais de recours contre les permis de construire, par exemple en les limitant à 6 mois.
  • faire une pause normative et s’arrêter à la RE 2020 pour ne pas enchérir les coûts de production.
  • flécher une part significative de la TVA ( par exemple 25%), vers les maires bâtisseurs, ou attribuer une prime par logement construit supplémentaire par rapport à la production moyenne des cinq années précédentes.
  • inverser le mode de taxation des plus values de cession des terrains, en allégeant de façon exceptionnelle les droits, pendant 3 ans par exemple, pour favoriser un choc d’offre foncière.
  • interdire les ventes par adjudication des terrains propriété des collectivités locales.

Rationaliser la référence du ZAN

  • assouplir la règle de la loi Climat et résilience, sur le mode de la proposition de loi du Sénat, soit en permettant l’artificialisation maîtrisée d’un pourcentage de la surface d’une commune, soit en autorisant une artificialisation d’une certaine surface définie en valeur absolue.
  • multiplier les expériences de bail réel solidaire.
  • étendre le modèle du bail réel à la production intermédiaire voire libre, avec des offices fonciers libres.

Favoriser l’évolution des pratiques professionnelles des promoteurs

  • rappeler que 87% de la production des promoteurs se bâtit sur des emprises foncières déjà artificialisées et 2% relève de la transformation d’immeubles existants, pour éviter la stigmatisation de l’acte de construire en France.
  • identifier le potentiel de reconstruction des villes sur elles-mêmes, notamment par la surélévation, mais aussi l’utilisation de foncier déjà imperméabilisé (tels que les parkings d’hypermarché ou de supermarché, ou de grandes entreprises), la construction sur des parcelles privées, ou encore l’extension d’immeubles existants.
  • favoriser le droit à expérimentation et le recours au permis de faire (liberté de choix des moyens, pour parvenir à une norme déterminée).
  • favoriser le recours à des modes constructifs et à des matériaux innovants pour abaisser les coûts de production, en particulier grâce à un meilleur lien entre les professionnels et le Centre scientifique et technique du bâtiment.
  • accompagner la transformation de la filière industrielle du bâtiment et travailler sur la décarbonation du second œuvre.
  • développer l’utilisation des outils numériques pour abaisser les coûts de construction, qu’il s’agisse de la digitalisation des procédures d’instruction des demandes d’autorisation de construire ou de la construction elle-même (BIM).

Préserver l’appareil de production

  • établir un plan national de reprise par la Caisse des dépôts et consignations des actifs construits par les promoteurs et non commercialisables à cause de la désolvabilisation de la demande.

 

A noter que le débat s’est tenu le 17 avril dernier. C’était le dernier dîner-débat du Club des penseurs AVIV-SeLoger avant les Assises du logement le 6 juin prochain, où les travaux du think tank seront restitués.

Depuis le débat, l’annonce par la Première Ministre de mesures spécifiques pour relancer le marché du logement sonne comme une heureuse nouvelle en attendant d’en savoir davantage. La reprise est déjà prévue par la Caisse des dépôts et consignations des programmes des promoteurs ne trouvant plus preneurs faute de financement des ménages par les banques. Un premier pas salutaire mais il reste nombre de points structurels et conjoncturels à adresser de manière urgente.

Etaient présents à ce débat animé par Henry Buzy-Cazaux, Président de l’Institut de Management des Services Immobiliers et parrain du Club des Penseurs : Didier Bellier-Ganière, Délégué général de la FPI, en tant que grand témoin, accompagné de Bernard Cadeau, expert immobilier et ancien président d’Orpi France; Vincent Cabon, Directeur Maîtrise d’Ouvrage chez AFC Promotion; Valérie Dubant-Kung, Directrice Générale Groupe Duval; Danielle Dubrac, Présidente de l’UNIS, Yann Goenvec, Directeur Général Adjoint de Woodeum; David Lacroix, Président de Maison Berval ; Thomas Lefebvre, VP Data & Science chez AVIV, Jean-Baptiste Marie, Directeur Général chez Europe des Projets Architecturaux et Urbains; Enrique Muzard, sociologue et Co-Président du Club de l’Évaluation; Cécile Roquelaure, Directrice des Etudes chez Empruntis.

 

 

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