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La régularité du mandat, condition du droit à commission de l’agent immobilier

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La signature d’un mandat de vente est soumise à des règles précises dont découle la rétribution de l’agent immobilier. Pour pouvoir prétendre à sa commission, l’agent immobilier doit se voir consentir par l’une des parties un mandat régulier, c’est-à-dire valable. En dehors des conditions de validité posées par la réglementation visant la profession d’agent immobilier, le mandat doit respecter d’autres réglementations d’ordre public telles que celle relative au démarchage à domicile. A défaut, le mandat est nul et l’agent immobilier ne peut donc prétendre à commission.

Les conditions classiques de validité du mandat posées par la loi Hoguet

Le mandat de vente doit stipuler l’identité des parties – mandants et mandataires – et leur adresse. Aucun texte, aucune jurisprudence n’imposent une liste plus précise des indications à renseigner à peine de nullité du mandat. A noter que le mandat, comme tout document professionnel, doit préciser, outre le nom ou la raison sociale et l’adresse de l’agence, le numéro et le lieu de délivrance de la carte professionnelle, l’activité exercée, ainsi que le nom et l’adresse du garant et, le cas échéant, les conditions dans lesquelles l’agent immobilier est habilité à recevoir, verser ou remettre des sommes d’argent, biens, effets ou valeurs à l’occasion de l’opération objet du mandat. Egalement, doivent y figurer la forme juridique de la société et son numéro d’identification, à savoir le numéro Siren ou, le cas échéant, le numéro Siret, ainsi que le montant du capital social. Le mandat doit préciser son objet (vente ou location), le bien visé et son prix. Par ailleurs, sa durée doit être limitée dans le temps. Dans le cas contraire le mandat est frappé de nullité.

  • Article 72 D. 1972
  • Articles 92 et 94 D. 1972
  • Articles R. 123-237 et R. 123-238 du Code de commerce
  • Article 7 L. 1970 lArticle 6 L. 1970

Outre ces conditions classiques qui ne méritent qu’un bref rappel, d’autres posées par la loi Hoguet ont donné lieu à des développements jurisprudentiels récents et méritent à ce titre une attention particulière.

Un mandat écrit, préalable à toute négociation, et en cours de validité

Préalablement à toute négociation, l’agent immobilier doit pouvoir justifier d’un mandat écrit. Les juges rappellent que l’agent ne peut demander de commission ou de rémunération lorsqu’il négocie ou s’engage sans détenir un tel mandat délivré par l’une des parties.

  • Articles 6 L. 1970 et 72 D. 1972 lCass. 1re civ., 24 octobre 2006 lCass. 1re civ., 2 octobre 2007

Le mandat doit être en cours de validité. La jurisprudence exclut en effet tout droit à commission au profit de l’agent immobilier qui se prévaut de la réalisation de la vente par son intermédiaire postérieurement à l’expiration de son mandat. Notons que le mandat établi doit correspondre à la nature réelle de l’intervention du professionnel. Ainsi, les juges dénient tout droit à commission à un agent immobilier, qui, pour demander le paiement de sa commission, invoquait un mandat de recherche de locataire alors que l’opération effectivement conclue était une vente. Les juges considèrent que cette dernière opération ne pouvait être réputée conclue par l’entremise de l’agent immobilier, qui ne disposait que d’un mandat de location.

Un document enregistré et numéroté

Le mandat doit être enregistré dans le registre des mandats et comporter le numéro d’immatriculation sur les exemplaires du client et de l’agent immobilier. La jurisprudence récente considère que le mandat non enregistré sur le registre et dépourvu de numéro sur l’exemplaire du mandant est nul. En conséquence, l’offre de vente faite au nom du vendeur par l’agent immobilier ne peut engager le vendeur à l’égard de l’acquéreur. Ne pouvant justifier d’un mandat régulier, l’agent immobilier ne pouvait engager valablement le vendeur. L’acquéreur évincé voit sa demande en vente forcée rejetée. Il apparaît également insuffisant à la validité du mandat que le numéro d’enregistrement ne soit reporté que sur l’exemplaire de l’agent immobilier.

  • Articles 6 L. 1970 et 72 D. 1972
  • Cass. 3e civ., 8 avril 2009
  • Cass. 1re civ., 16 novembre 2004
  • Cass. 1re civ., 16 octobre 2001

La mention de la commission et de la ou des partie(s) en supportant la charge

Le mandat, comme le compromis, doivent préciser les conditions de détermination de la commission et la partie qui en a la charge. Rappelons que l’agent immobilier ne peut demander, ni recevoir, directement ou indirectement, des commissions ou des rémunérations d’une personne autre que celle mentionnée comme en ayant la charge dans le mandat et dans l’engagement des parties. En conséquence, les juges considèrent que l’agent immobilier ne peut prétendre au paiement de sa commission par l’acquéreur, qui s’y est engagé dans l’acte authentique, alors que le mandat stipulait que la commission était à la charge du vendeur. Egalement, le mandat qui précise un « prix net vendeur » inférieur au prix de vente « commission comprise » ne désigne pas valablement l’acquéreur comme devant en supporter la charge. Dans ce cas, la désignation de l’acquéreur était implicite et résultait de la logique de l’indication du prix. Les juges écartent cependant le droit à commission de l’agence : la partie qui a la charge de la commission doit être expressément stipulée. Dans ces deux affaires, les juges ouvrent toutefois une possibilité de régularisation. Par une convention, les parties à la vente peuvent s’engager à rémunérer l’agent immobilier. Cette convention n’est valable que si elle est postérieure à la signature de l’acte authentique de vente.

  • Articles 6 L. 1970 et 73 D. 1972
  • Cass. 1re civ., 21 février 2006

Les modifications apportées au mandat : l’avenant

Aucun texte ne réglemente expressément l’avenant au mandat. Mais, au vu des règles qui précèdent, en cas de modification du mandat concernant tant le prix que la commission ou la partie en ayant la charge, il convient, afin de sécuriser le droit à commission de l’agence, de procéder à une modification du mandat par un avenant. Une interrogation persiste concernant un avenant relatif à une baisse de prix. Convient-il d’appliquer le barème des honoraires de l’agent immobilier au nouveau prix lorsque sa réduction entraîne un changement de tranche ? Plusieurs fondements justifient une réponse positive. D’une part, le décret d’application de la loi Hoguet indique que « si le mandat prévoit une rémunération forfaitaire, celle-ci peut être modifiée lorsque le prix de vente ou de cession retenu par l’engagement des parties est différent du prix figurant dans le mandat ». D’autre part, le principe général de bonne foi et de loyauté contractuel les posé à l’article 1134 du Code civil peut justifier l’application du barème au nouveau prix.

  • Article 1134 du Code civil lArticle 75 D. 1972

Soulignons par ailleurs que, dans le cas d’un avenant à un contrat signé à domicile, les juges écartent l’application de la loi sur le démarchage. Par analogie, l’avenant au mandat signé en dehors de l’agence serait donc exclu du champ d’application de cette loi. Le mandant ne bénéficierait donc pas d’un délai de renonciation pour la signature de l’avenant. Cette solution se justifie par l’existence préalable entre les parties d’un contrat. Selon les juges, l’avenant modifie un contrat préexistant et ne fait donc pas l’objet d’un démarchage mais de pourparlers entre les cocontractants initiaux. La loi sur le démarchage à domicile trouve toutefois à s’appliquer dans le cadre de la signature d’un mandat hors de l’agence.

  • CA Douai, 29 juin 2000
  • Cass. 1re civ., 15 janvier 2003

Les conditions d’un mandat régulier posées par la loi relative au démarchage à domicile

La souscription d’un mandat au domicile du vendeur, ou dans un lieu autre que l’agence, entraîne l’application de la réglementation relative au démarchage à domicile. Dans ce cadre, le mandant dispose d’un droit de renonciation de sept jours suivant celui de son engagement.

  • Cass. Crim., 28 novembre 2000

Pour être valable et garantir le droit à commission de l’agent, l’exemplaire du mandat remis au client doit comporter, à peine de nullité, les mentions énoncées aux articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation. Le mandat doit comprendre un formulaire détachable destiné à l’exercice de la faculté de renonciation, dont le contenu est également réglementé.

  • Articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation
  • Articles R. 121-3 et suivants du Code de la consommation

L’agent immobilier qui se verrait consentir un mandat par démarchage à domicile ne répondant pas à ces conditions de fond et de forme, ne pourrait donc pas s’en prévaloir pour demander une indemnisation ou le paiement de sa commission.

  • Articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation.
  • Cass. 1re civ., 26 juin 2001

Emmanuelle Jaulneau.
Expert immobilier, Business Fil

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