Portrait de Robin Rivaton : un électron libre passionné, qui veut nourrir les idées dans l’immobilier

Robin Rivaton, entrepreneur libéral de 37 ans, passionné par l’immobilier et l'innovation, s’est vu confier par la ministre du Logement une mission d’évaluation de la réglementation RE2020. Rencontre et portrait de ce jeune loup qui nourrit dès qu’il le peut les idées et le débat public.
Électron libre

À moins de quarante ans, Robin Rivaton a déjà eu mille et une vies professionnelles. Comment tirer son portrait sans tomber dans un inventaire à la Prévert ? Le trou de souris dans lequel se glisser est tout trouvé : le serial entrepreneur – passionné par l’immobilier et l’innovation – a été missionné en mars dernier par la précédente ministre du Logement, Valérie Létard, pour évaluer la réglementation RE2020 au regard du bénéfice environnemental. « Une mission bénévole », tient-il à préciser. Ce n’est pas la première fois que Robin Rivaton accepte ce sacerdoce au nom de l’État : sous le précédent quinquennat d’Emmanuel Macron, le Gouvernement lui avait déjà commandé un rapport sur l’industrialisation de la construction et de l’immobilier.

« J’aime profondément le logement, parce que c’est un secteur miroir de la vie des Français. » Grâce à un savant dosage de talent et d’entregent, ce surdoué polymorphe a toujours eu l’oreille attentive des puissants de la sphère économico-politique : ‘‘plume’’ du PDG d’Aéroports de Paris (ADP), Augustin de Romanet, puis secrétaire du comité exécutif du groupe, il a été conseiller chargé de l’attractivité et du développement économique au sein du cabinet de Valérie Pécresse à la région Île-de-France ou encore conseiller politique bénévole de Bruno Le Maire lors de la primaire de la droite en 2016.

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Agilité

Partir sur les traces de cet intellectuel de centre droit et libéral assumé, c’est faire un détour par Firminy, ancien bassin sidérurgique dans la banlieue de Saint-Étienne. « J’ai grandi dans une famille extraordinaire qui prend racine dans le monde ouvrier. » Sa ville natale ne connaîtra jamais l’essor qu’avait esquissé son maire Eugène Claudius-Petit dans les années 50-70 : malgré la Cité radieuse bâtie par Le Corbusier, Firminy subit les effets de la désindustrialisation dès les années 80. « Aujourd’hui, c’est un bassin dévasté économiquement » observe-t-il.

Si Robin Rivaton cultive très tôt un goût pour la chose publique – il opte pour la filière ‘‘service public’’ à l’IEP de Grenoble en surplus d’une licence d’économie –, il gagne finalement Paris, où il pousse les portes de deux écoles : Sciences Po (finance) et l’ESCP Europe (droit des marchés). Au fil des années et de ses expériences professionnelles, le jeune prodige creuse son sillon dans le privé. Il passe par The Boston Consulting Group ou encore Eurazeo, lance de jeunes pousses et dirige Stonal – plateforme de gestion de données pour les propriétaires et investisseurs immobiliers en Europe – depuis 2022.

« J’ai préféré mettre mon énergie vers l’externe plutôt que l’interne afin d’être plus agile et ne pas être empêché d’agir et d’innover par des jeux de pouvoirs et une bureaucratie trop lourde. »

Bombe sociale

À la frontière de deux univers – les nouvelles technologies et l’immobilier –, Robin Rivaton cofonde, avec Vincent Pavanello, Real Estech en 2016. Avec ce think tank, le jeune loup nourrit dès qu’il le peut les idées et le débat public. Au cœur de l’élection présidentielle de 2022, il a cette formule choc, reprise depuis par les politiques et promoteurs : « Le logement, une bombe sociale à venir ».

« Même si cette bombe n’explosera jamais, la formule est toujours d’actualité, stipule-t-il. La part de propriétaires primo-accédants qui n’a pas augmenté depuis 2006 – alors que nous avons connu les taux d’intérêt les plus bas de l’économie moderne – et l’impact de la sous-production de logements ont des effets néfastes sur ce marché, en premier lieu pour les locataires dans le parc privé. »

Pour enrayer cette crise profonde, Robin Rivaton prodigue deux mesures fortes : augmenter le stock de logements (surélever, densifier les zones pavillonnaires…) et simplifier l’acte de construire, avec, entre autres, un régime spécial pour les maires qui encouragent la transformation de bureaux en logements. « L’État devrait fournir l’outil informatique d’instruction des autorisations d’urbanisme », ajoute-t-il.

RE2020, la suite

Très médiatique, Robin Rivaton cultive sa plume de chroniqueur dans les colonnes de L’Express et Les Échos. Cet électron libre est également essayiste, avec pas moins de huit ouvrages à son actif, dont ‘‘La Ville pour tous’’ et ‘‘Souriez, vous êtes filmés !’’. « L’écriture est une passion qui m’anime profondément », confie ce passionné du XVIIIe siècle et de science-fiction, en particulier le sous-genre de l’ucronie.

Loin de réécrire l’Histoire à partir de la modification du passé, Robin Rivaton évalue les impacts économiques de la (très) complexe et technique RE2020 – et plus particulièrement le jalon 2028. Sans dévoiler ses conclusions attendues pen juin l’expert immobilier précise que sa mission s’inscrit dans un contexte de recul de la production, des mises en chantier et des livraisons de logements neufs. « Au-delà d’évaluer les coûts et impacts de la RE2020, je me penche aussi sur la méthode et les process qu’il faudra sans nul doute améliorer. » Son regard sur Valérie Létard, nommée à la tête du portefeuille du Logement suite la dissolution de l’été 2024 :
« Elle a réussi à rassurer ce secteur avec quelques concessions budgétaires, comme la réduction de la RLS et l’extension du PTZ. C’est la première fois que les professionnels se sentent considérés depuis 2018 et la loi Élan. »

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Optimisme

Qualifié d’‘‘anti-Zemmour’’ par Alain Juppé en 2014, après avoir lu son livre optimiste « La France est prête », comment Robin Rivaton observe-t-il, onze ans plus tard, les réactionnaires et populistes au pouvoir dans le monde ? « Les crises ont toujours favorisé ces mouvements qui surfent sur la peur. Mais il y a de la place pour un programme techno optimiste ! ». Alors pourquoi ne pas franchir le Rubicon de la politique ? « Je me poserai cette question le jour où on me proposera d’être ministre du Logement », répond-t-il du tac au tac.

Celui qui trouve pleine satisfaction dans l’entrepreneuriat, dit ne pas avoir ‘‘envie d’exposer’’ ses deux filles (de cinq et deux ans) à ‘‘la brutalité de la vie politique’’. Un univers qui gagnerait, selon lui, à s’inspirer de l’agilité des entreprises pour un État ‘‘moins vertical’’ et ‘‘concentré’’ sur le régalien et le social. Pas encore de quoi faire un programme made in Rivaton, mais de participer au débat public, à deux ans de la prochaine élection présidentielle.

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