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Formalisme, nullité et loi Hoguet, par Caroline Dubuis Talayrach, avocat

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Une décision de la cour de cassation en faveur des professionnels de l’immobilier.

photo : compromis journal de lagence

Enfin, une bonne nouvelle qui contribue à la sécurité juridique des actes et du droit à honoraires. Le sujet peut paraître technique pourtant les implications sont très concrètes.

Revirement de jurisprudence

La Cour de cassation vient d’opérer un revirement de jurisprudence (Cass. Ch. Mixte. 24 février 2017, n° 15-20411). Un locataire contestait la validité d’un congé pour vente en soutenant que le mandat du professionnel était nul pour non-respect du formalisme de la loi Hoguet : le congé pour vente était nul car délivré en vertu d’un mandat nul. Jusqu’à présent, la nullité du mandat pour non-respect du formalisme « Loi Hoguet » pouvait être soulevée par toutes personnes y ayant intérêt : un locataire pour contester la validité d’un commandement de payer (Cass. 1re civ., 18 octobre  2005, n° 02-16046), un assureur pour refuser sa garantie en responsabilité civile professionnelle (Cass. 1re civ., 25 février 2003, n° 01-00461) ou encore par un acquéreur.

Désormais, seul le mandant peut se prévaloir d’une nullité de mandat relative au formalisme de la loi Hoguet.

La situation est donc plus favorable au professionnel, qui pour autant, ne peut pas s’affranchir du respect de ladite loi, ni pénalement, ni civilement dans ses rapports avec le mandant.

Je vous propose donc de revenir sur les conditions de forme imposées par la loi Hoguet. Ces dernières étant très nombreuses, nous en aborderons certaines, ci-dessous, sans que la liste soit exhaustive.

Le formalisme de la loi Hoguet

On ne le dira jamais assez : avoir un mandat conforme, c’est protéger son droit à honoraires. Ne pas être payé parce qu’un numéro n’a pas été reporté sur l’exemplaire du mandat du client est difficile à accepter. Alors quel formalisme respecter ?

1- Avoir un contrat écrit

Le mandat oral n’est pas valable (Cass. 1re civ., 5 juin 2008, n° 04-16368). Plus qu’un écrit, il faut un contrat écrit. Ainsi un courrier n’est pas un contrat au sens de la loi Hoguet (Cass. 1re civ., 8 avril 2010, n° 09-12007).

2- Établir des originaux

Le mandat doit être établi en autant d’originaux que de parties ayant un intérêt distinct. Cela suppose d’avoir a minima 2 exemplaires… et des originaux. Rappelons qu’une « signature » par échange de mails et scan n’est pas conforme et le mandat (ou l’avenant) est nul (voir « Mail, PDF, Scan… et la loi Hoguet », Journal de l’Agence n° 50, pp. 40-41).

3- Indiquer des honoraires déterminés ou déterminables

Ce peut être un montant ou pourcentage et une assiette (ex. : X % du prix de vente). Ne pas fixer les honoraires en renvoyant au barème de l’agence (Cass. 1re civ., 30 novembre 2016, n° 15-24024) ou à « un prétendu tarif légal » (Cass. 1re  civ., 24 mai 1989, n° 88-10126), ce n’est pas valable.

4- Stipuler le débiteur des honoraires

C’est-à-dire, pour la vente, le vendeur ou l’acquéreur (Cass. 1re civ., 8 octobre 2009, n° 08-14968). En cas de partage d’honoraires, indiquer la répartition entre ces derniers (ex. : 50 % vendeur et 50 % acquéreur)

5- Mettre en caractère très apparents certaines clauses

Dans les mandats de vente et de location, la clause d’exclusivité, la clause pénale et la clause de dénonciation du mandat doivent toutes être en caractères très apparents (Cass. 1re civ., 24 mai 1989, n° 88- 10126). Attention : Il ne suffit pas que les titres soient en gras et en grands caractères, il faut aussi que le corps de la clause soit en caractère « très apparents » par rapport à l’ensemble des conditions générales du mandat (gras et taille de caractère supérieure/majuscules) Cass. 1re civ.,5 mars 2015, n° 1413062.

6- Reporter le numéro d’enregistrement

Le numéro d’enregistrement du mandat doit être reporté sur l’exemplaire laissé en possession du client. La  jurisprudence est constante (Cass. 3e civ. 8 avril 2009, n° 07- 21610 ; Cass. 1re civ, 3 février 2004, n° 01-17763, Cass. 1re  civ.16 octobre 2001, n° 99-16920). Reportez vous-même le numéro d’enregistrement sur le mandat plutôt que de le demander au client, car s’il ne le fait pas, le mandat sera nul. Rappelons également que le mandat doit être remis immédiatement au mandant.

7- Limiter la clause de durée

Le mandat doit avoir une date butoir au terme de laquelle il prendra fin (article 7 de la loi Hoguet). Ainsi un mandat d’un an renouvelable tacitement pour une même durée n’est pas limité dans le temps (Cass. 1re civ. 18 octobre 2005, n° 02-160046) et donc nul.

8- Ne pas restreindre la faculté de résiliation

Les mandats de vente ou de location comportant une clause pénale (c’est-à-dire presque tous) ou une clause d’exclusivité, passés un délai de trois mois, peuvent être dénoncés à tout moment moyennant un préavis de 15 jours par lettre recommandée avec accusé de réception. Limiter, après les trois premiers mois, la résiliation à certaines périodes entache de nullité le mandat. Ainsi est nul le mandat dont la clause prévoit que passé trois mois le mandat se renouvellera par tacite reconduction « pour une durée de trois mois en trois mois « sauf dénonciation avant l’expiration de l’une des périodes sus indiquées » (Cass. 1re Com. 3 novembre 2016, n° 15- 23534 ; Cass. 1re civ., 29 mai 2013, n° 12-15220).

Conclusion

Outre les causes de nullité ci-dessus, il y a également celles issues des mentions de la loi Alur (moyens utilisés et exclusivité), celles relatives à l’identité de l’agent immobilier, à sa carte professionnelle, aux attestations des collaborateurs et aux obligations du code de la consommation. Aussi, si vous utilisez des « modèles maison » (même faits à partir de mandats établis par des professionnels) sans veille juridique, vous vous exposez certainement à des nullités compte tenu, a minima, de l’inflation législative de ces dernières années. Pour sécuriser vos mandats, faites les auditer par un professionnel du droit et souscrivez une veille législative avec mise à jour ou utilisez la dernière version des mandats rédigés par des professionnels (éditeur, syndicat, réseaux…).

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Après plus de 20 ans d’exercice en Cabinet d’Avocats Conseils et comme Directrice Juridique et Méthode d’une enseigne nationale de franchise en agences immobilières, Maître Caroline Dubuis-Talayrach a ouvert, son propre cabinet dédié au droit des affaires et au droit immobilier.

Sa philosophie : Conseiller – Négocier– Rédiger– Défendre.  Basée à Aix en Provence elle intervient sur toute la France.  Site internet : www.cdubuistalayrach.com  Mail : cdubuistalayrach@cdtavocat.com

 

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Caroline Dubuis Talayrach

Caroline Dubuis Talayrach
Après plus de 20 ans d’exercice en Cabinet d’Avocats Conseils et comme Directrice Juridique et Méthode d’une enseigne nationale de franchise en agences immobilières, Maître Caroline Dubuis-Talayrach a ouvert son propre cabinet de :
- Mandataire en cessions d’agences immobilières, cabinets d’administration de biens et syndic
- Droit des affaires : Conseil et rédaction des actes en création et transmission d’entreprises, droit des contrats, droit de l’agent commercial, droit des sociétés, droit de la franchise, baux commerciaux
- Droit de l’agent immobilier : Conseil et rédaction des actes d’achat/vente de cabinets, formation professionnelle, exercice professionnel, honoraires, création de savoir-faire métiers

Sa philosophie : Conseiller – Négocier– Former– Défendre
Basé à Aix en Provence j'interviens sur toute la France.
Tel : 06 16 72 18 90

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