« Rédiger la promesse pour gagner du temps », Quentin LAGALLARDE, Expert près la Cour d’Appel de Caen et Enseignant droit immobilier et expertise immobilière

La rédaction d’actes juridiques fait partie des compétences de l’agent. Avec, à la clé, la sécurisation de la transaction.

La loi Hoguet de 1970 et son décret d’application de 1972 ont institué un statut et un cadre pour l’exercice de la profession d’agent immobilier. Littéralement, sa mission est l’intermédiation entre vendeur et acquéreur, bailleur et locataire. Mais la loi lui a aussi laissé la possibilité de rédiger des actes juridiques à condition qu’ils soient les accessoires d’une opération définie par ce cadre légal. Un privilège, puisque, d’ordinaire, la rédaction d’actes juridiques n’est autorisée que pour les détenteurs d’au moins une licence en droit. Donc, tout comme le notaire, l’agent peut rédiger ses compromis, contrats de vente immobilière.

De la responsabilité de l’agent immobilier

Biien souvent qualifé d’avant-contrat, le compromis (ou promesse synallagmatique de vente) est en droit un véritable contrat de vente immobilière. L’instrumentation par le notaire lors de la vente n’est en fait qu’une dernière formalité ayant un double rôle : vérifier la validité de la convention antérieure pour assurer la sécurité juridique des parties et constater le transfert de propriété qui ne peut être effectué que par acte authentique.

Or, de très nombreux agents immobiliers font encore le choix de ne pas rédiger leurs compromis de vente, déléguant cette tâche au notaire. La plupart d’entre eux invoquent la complexité de la rédaction et l’intérêt qu’ils en tirent de dégager leur responsabilité en la transférant sur le notaire. Il faut mettre un terme à cette fausse croyance : à partir du moment où il participe à  une transaction, l’agent immobilier est responsable des erreurs contenues dans l’acte même s’il en a confié la  rédaction à un professionnel du droit (partage de responsabilité dans ce cas). L’agent immobilier qui confie la rédaction à un tiers doit impérativement relire l’acte, attirer l’attention de ses clients sur la portée des clauses, voire demander que soient amendées les clauses qui seraient contraires à la volonté ou à l’intérêt des clients.

Oser passer à l’acte …

Est-ce compliqué de rédiger ? A priori, oui, mais cela s’apprend. Il est évident que pour les dossiers complexes, l’assistance du notaire semble indispensable afin d’assurer la sécurité  juridique de l’opération. Mais, autrement, c’est tout à fait à la portée de l’agent immobilier. Cela nécessite méthode et organisation : collationnement complet des pièces (dès la prise de mandat), lecture et analyse de ces pièces, rédaction et explication de l’acte aux clients, etc.

Pour franchir le pas et établir leurs premiers actes, les plus timorés pourront s’aider de quelques exemples de compromis précédemment rédigés par un notaire. Et aujourd’hui, l’agent immobilier n’est plus seul face à cette montagne juridique : la loi Alur a instauré une obligation de formation continue qui lui offre l’opportunité de se former au droit et d’entretenir ses connaissances.

… en se faisant assister d’un logiciel de rédaction

Les évolutions informatiques ont également permis la création de véritables solutions de rédaction d’actes.  Auparavant, quelques logiciels permettaient de remplir des cases, mais les clauses ne pouvaient être adaptées à chaque vente, qui est unique. Désormais, l’agent immobilier, tout comme le notaire, peut s’équiper d’un logiciel de rédaction assistée pour ses actes. Par un jeu de questions/réponses et d’enchaînements de variables, une telle solution permet au professionnel d’avoir une trame personnalisée à l’unicité de chaque vente, en disposant de clauses juridiquement viables qui s’adapteront à chaque situation. Une telle solution, avec un dossier bien préparé en amont dès la prise de mandat, permet de pouvoir rédiger un acte fiable et efficace dans un temps très court.

Garder la maîtrise des délais

Le temps est précieux en matière de vente immobilière. Avec le renouveau de la profession et l’augmentation du nombre d’actes, un notaire à qui est confi ée la rédaction d’un avantcontrat ne propose un rendez-vous de signature dans le meilleur des cas qu’une à deux semaines après l’accord des parties. Ce délai entre l’offre acceptée et le rendez-vous de signature de l’avant-contrat est une période hasardeuse, avec un acquéreur qui peut être tenté de changer d’avis sans prendre de grands risques. Tout votre travail sera à refaire… Qui ne connaît pas le cas de ce confrère qui, à force d’attendre que le notaire soit disponible, a vu son acquéreur reporter son achat sur un autre bien ?

Rédiger, c’est maîtriser ses délais et conserver le tempo de la relation client. On peut désormais affirmer qu’un dossier bien préparé dès la prise de mandat peut faire l’objet d’une signature de compromis quelques heures à peine après l’acceptation de l’offre. Sans parler du recours à la signature électronique qui facilite une signature à distance et de la lettre recommandée électronique qualifi ée eIDAS qui permet de notifier régulièrement l’acte aux acquéreurs dans les minutes qui suivent sa signature.

Eviter les erreurs

C’est aussi une question récurrente des professionnels qui préparaient euxmêmes leurs compromis avant de renoncer, découragés par l’inflation législative qui a fait gonfler le nombre de pages des actes. La responsabilité de l’agent immobilier pouvant être engagée sur des clauses qui seraient contraires aux intérêts des parties (qu’il rédige ou non l’acte !), il lui appartient, soit de maintenir un excellent niveau de veille juridique pour mettre à jour la trame personnelle, soit de se fier à une solution de rédaction assistée. Cette dernière permet à l’agent immobilier de consacrer davantage de temps au coeur de son métier tout en offrant l’accessoire indispensable à la réalisation de sa mission : la rédaction de l’acte.

À l’heure où la profession s’est ubérisée, où le particulier est à même de reproduire une majorité du travail de l’agent immobilier, il appartient impérativement à ce dernier de s’en distinguer en offrant un service de qualité dans les meilleurs délais pour assurer la sécurité juridique des parties et la pérennité de la transaction. Cet aspect administratif et peut-être rébarbatif de la profession est pourtant une des clés, si l’agent immobilier sait mettre en avant son savoirfaire pour se distinguer sur ce marché concurrentiel.

Aujourd’hui, rédiger est un impératif, gage de la qualité de la prestation fournie par l’agent immobilier. Cela lui permet de gagner du temps, de maîtriser la relation client sur toute sa durée et, contre une idée souvent reçue, de limiter le risque de voir sa responsabilité engagée par les erreurs d’un autre.

Alors, à vos claviers, rédigez et signez !

 

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Quentin LAGALLARDE: Quentin LAGALLARDE , Chartered surveyor MRICS, expert évaluateur en immobilier près la Cour d’Appel de Caen. Certifié en expertise immobilière de l'ESSEC Business School et titulaire du DU expertise judiciaire (faculté de Droit de l'université de CAEN). Il est membre agréé du collège des experts du SNPI, Quentin LAGALLARDE dispose de plusieurs années d'expérience dans différents cabinets immobiliers en matière d'expertise, transaction et location. Il est certifié REV par TEGoVA, MRICS et également inscrit sur la liste des experts près la Cour d'Appel de Caen. En sus de son activité expertise, il est formateur auprès des professionnels de l’immobilier. Ses formations sont disponibles sur www.cotentin-expertise.fr. Téléphone : 02 33 03 17 02