Congé pour rénovation globale d’un logement loué : les conditions de validité

Le bailleur qui doit réaliser de lourds travaux de rénovation est fondé à délivrer à ses locataires un congé pour motifs légitimes et sérieux. Mais quelles sont les conditions de validité de ce congé ? Explications d'Emmanuelle Jaulneau, experte en droit immobilier, à l'appui de la jurisprudence.
congé pour rénovation

Le contexte

Un bail avait été signé en 2007. En 2021, le bailleur fait délivrer à ses locataires, pour le terme du bail, par acte d’huissier, un congé pour motifs légitimes et sérieux fondés sur de lourds travaux de rénovation qu’il souhaite entreprendre dans l’immeuble et le logement loué. Les locataires, contestant le motif et invoquant un congé frauduleux, ont agi devant le juge des contentieux de la protection pour en obtenir l’annulation. Les juges du fond ayant validé le congé, exclu la responsabilité de l’agence gestionnaire, condamné les locataires au paiement d’une indemnité d’occupation et ordonné leur expulsion, ces derniers ont interjeté appel.

La jurisprudence

La cour d’appel de Bordeaux, dans un arrêt du 6 janvier 2025, confirme le jugement et valide le congé. Les juges rappellent que le congé délivré pour motifs sérieux et légitimes visant de lourds travaux de rénovation est valable, au regard de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989, à la condition toutefois que le bailleur puisse justifier de la réalité de son projet de travaux et de la nécessité de libérer les lieux pour les exécuter.

Quant au sérieux du motif invoqué, les juges relèvent que l’intention du bailleur et la réalité du projet de rénovation sont établies notamment par la preuve de la signature d’une proposition d’honoraires d’un géomètre-expert, la communication des plans réalisés, d’une estimation complète du montant des travaux, et la communication de différents devis de travaux, réalisés avant même que le congé ne soit donné.

Egalement, les juges retiennent l’existence d’une note de synthèse concernant la rénovation complète de l’immeuble établie par un architecte plusieurs mois avant le congé, faisant état du coût des travaux, tels que notamment ceux relatifs à “l’amélioration de la performance énergétique des appartements, l’amélioration du confort acoustique et la remise à niveau de la qualité esthétique des logements et notamment le remplacement des appareils de chauffage électriques d’ancienne génération et très énergivores par de nouveaux radiateurs plus performants avec mise en place de thermostats réglables (…)”.

Par ailleurs, un congé identique avait été délivré aux autres locataires de l’immeuble. Quant à la légitimité du motif, le bailleur doit pouvoir justifier de la nécessité des travaux et de libérer les lieux, ce qui résulte en l’espèce de la preuve du projet de rénovation globale, en vue d’améliorer les performances de l’immeuble, tenant en des travaux d’envergure portant sur l’ensemble des appartements, qui selon les juges “ne peuvent être exécutés sur un laps de temps court et ne permettent en aucun cas le maintien des locataires dans les lieux en regard notamment de la poussière, du bruit et des risques pour la sécurité qu’ils généreront, nécessitant pour ce faire l’enlèvement de tous les meubles”.

Et pour votre agence ?

Lorsque le bailleur souhaite délivrer un congé, il vous appartient de lui rappeler les conditions de validité d’un tel congé, qui doit nécessairement être motivé dans le cadre d’un bail d’habitation soumis à la loi du 6 juillet 1989, par la vente, la reprise pour habiter ou pour motifs légitimes et sérieux, et de vérifier qu’elles sont réunies.

Votre rôle est essentiel afin de sécuriser le projet du bailleur et lui permettre de justifier de la légitimité de son congé, en cas de contestation, notamment à l’heure de la décence énergétique.

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