Derrière une reprise encore incomplète, trois signaux faibles captés par les données issues de 8 500 agences indépendantes laissent entrevoir une transformation en profondeur du marché immobilier. Le dernier baromètre Interkab dessine les prémices d’un nouveau cycle.
La revanche des primo-accédants : vers une bascule générationnelle ?
Les primo-accédants représentent désormais 27 % des acheteurs, soit une progression de +7 points en un an. En parallèle, les investisseurs se retirent (9 %, contre 15 % deux ans plus tôt) et les seniors deviennent moins actifs (23 %, -7 points sur la même période).
S’agit-il d’un simple ajustement conjoncturel ou d’un véritable tournant générationnel ? Cette recomposition des profils d’acquéreurs s’opère dans un contexte d’accès au crédit légèrement amélioré, comme en témoigne la baisse du taux de dossiers refusés à 17 % (-1,4 point).
Le principal frein à l’achat reste le niveau des prix : 32 % des agents estiment que leurs clients jugent les biens toujours trop chers, tandis que 28 % évoquent une stratégie d’attente, les acheteurs guettant encore « la bonne affaire ». Ce comportement plus attentiste confirme un changement de rapport de force sur un marché redevenu favorable à l’acheteur. Les acquéreurs anticipent une possible correction des prix, soulignant le décalage persistant entre les valeurs affichées et les capacités ou attentes réelles.
L’incertitude générale (22 %) et les conditions de financement (18 %) complètent ce tableau d’un marché encore suspendu à une reprise psychologique, davantage qu’à un redémarrage mécanique.
Pas de rebond spectaculaire, mais une stabilisation progressive : le marché semble amorcer une phase de réalignement sur ses fondamentaux, plus réaliste et rationnelle. Les indicateurs du deuxième trimestre confirment cette tendance :
+5 % de compromis signés au T2 2025 (vs T1), avec des hausses marquées en PACA (+19 %) et en Île-de-France (+7 %)
Prix au m² stables au niveau national (0 % vs T1)
Marge de négociation en léger repli : -5,4 % (vs -5,7 % un an plus tôt)
Délais de vente toujours longs : 144 jours en moyenne
L’IA transforme en profondeur les attentes des acheteurs
Au-delà des chiffres, une évolution plus discrète mais structurante se profile : l’impact croissant de l’intelligence artificielle sur les usages. Plus d’un tiers des professionnels observent que l’IA bouleverse les comportements : les acheteurs arrivent mieux informés, plus préparés, plus exigeants.
« L’IA change le jeu : on ne peut plus se contenter d’une annonce peu documentée. Les clients arrivent briefés, ils challengent les professionnels, et c’est plutôt sain », analyse Olivier Bugette, CEO de La Boîte Immo.
Ces signaux faibles ne sont pas anecdotiques. Ils appellent les professionnels à ajuster leur posture commerciale, affiner leur lecture du marché local, et intégrer plus finement les nouveaux usages numériques. La période actuelle exige un double effort : réassurer les acheteurs tout en se dotant d’outils plus précis pour valoriser l’expertise terrain. Plus que jamais, la capacité à anticiper — et à s’adapter — fera la différence.