Les décisions politiques et financières sous surveillance
Pour l’instant, les marchés semblent avoir intégré le risque politique. « Le vote de censure n’a pas provoqué de choc », assure Caroline Arnould, directrice générale de CAFPI. Le renversement du Gouvernement Bayrou a été rapidement absorbé par les marchés obligataires : l’OAT 10 ans, après un pic à 3,50 %, est retombée à 3,40 %. Pour la directrice, « les véritables catalyseurs pour les taux de crédit ne sont pas politiques, mais financiers ».
À cet égard, deux rendez-vous décisifs se profilent : la notation de l’agence Fitch, attendue ce vendredi 12 septembre, et celle de la BCE, le 11. Un abaissement de la note de la France pourrait relancer la tension sur les taux. Une perte de crédibilité financière fragiliserait la note souveraine, entraînant une hausse mécanique de l’OAT à 10 ans, possiblement jusqu’à 3,83 % (Meilleurtaux). Les banques, déjà plus strictes sur l’apport et les dossiers, accentueraient leur sélectivité. À l’inverse, un statu quo de la BCE « conforterait la détente observée ces derniers jours ».
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Des signaux contrastés sur les taux d’intérêt
Bruno Rouleau, cofondateur et délégué général de la Fédération du Courtage en Crédit, le confirme : l’évolution des taux va dépendre en premier lieu de la note attribuée par les agences. Il explique : « une dégradation de la note pourrait entraîner une remontée des taux.Toutefois, malgré notre dette catastrophique, la signature de la France reste cohérente au regard de ses actifs, il n’y aura pas de réaction catastrophique ».
Mais ce n’est pas tout : la confiance des acteurs et le dynamisme du marché vont aussi dépendre de la capacité du nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu à créer un gouvernement efficace, qui ne soit pas bloqué dans ses décisions, notamment pour le vote de la loi de finances 2026. Une politique financière crédible doit être menée, car à défaut, si les marchés perçoivent un relâchement des efforts budgétaires, la confiance pourrait diminuer, poussant les rendements des emprunts d’État à la hausse.
De son côté, Henry Buzy-Cazaux, président de l’IMSI, rappelle que « l’instabilité institutionnelle de notre pays contrarie d’évidence la relance du logement ». Selon lui, la perspective d’une « hausse des taux d’intérêt, d’une crise de confiance des entrepreneurs immobiliers et des investisseurs comme des ménages » menace directement la reprise.
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La reprise du marché immobilier contrariée
Si le marché immobilier commençait à peine à se redresser, le spectre d’une remontée des taux menace toutefois cette dynamique. « La hausse des taux longs sur les marchés risque de se répercuter sur les taux de crédit bancaires et de bloquer à nouveau le marché », avertit Élodie Frémont, porte-parole des notaires du Grand Paris (Capital).
Le secteur neuf aussi est inquiet. « Avec cet enchaînement de gouvernements successifs et de ministres, nous ne pouvons rien bâtir dans notre secteur de fiable pour le logement des Français, pour loger les plus modestes, leur donner l’espérance aujourd’hui d’acquérir ou de louer un logement, ni de rénover énergétiquement« , a déclaré Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment.
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Dans ce climat incertain, Henry Buzy-Cazaux appelle à un effort de pédagogie : « Les professionnels de l’immobilier vont devoir rassurer les Français et mesurer qu’ils constituent pour eux des repères pour leurs choix patrimoniaux, quand tous les autres repères se troublent ».
Si la chute du gouvernement Bayrou n’a pas, à ce stade, provoqué de secousse majeure, le marché immobilier reste en première ligne face à un éventuel retour de la pression sur les taux. Dans cette phase d’attente, les professionnels de l’immobilier doivent se préparer à un environnement plus exigeant, où leur rôle de tiers de confiance et de stabilisateur sera plus essentiel que jamais.
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