Redonner confiance aux bailleurs privés et dynamiser l’offre locative : tel est l’objectif du rapport parlementaire Daubresse-Cosson, remis le 30 juin 2025, dans un contexte de crise du logement et d’effondrement des ventes aux investisseurs particuliers. Amortissement forfaitaire, bonus pour loyers abordables, révision du déficit foncier, allégement de l’IFI et exonération accélérée des plus-values… figurent parmi les mesures phares. Décryptage de ces propositions par Maître Stéphane Buffa, avocat fiscaliste associé du cabinet KAIRNS Avocats.
Alors que la France traverse une crise du logement sans précédent et que les ventes aux investisseurs particuliers ont chuté de 41 % au premier trimestre 2025, le rapport parlementaire Daubresse-Cosson était très attendu ! Réclamée de longue date, la création d’un véritable statut fiscal du bailleur privé vise à rééquilibrer la fiscalité et à redonner confiance aux propriétaires souhaitant louer leur bien comme résidence principale, sans alourdir la dépense publique.
Présenté le 30 juin dernier, ce rapport avance cinq mesures phares dont l’entrée en vigueur est envisagée au 1er décembre 2025.
Proposition n°1
La première proposition contient deux projets. Le premier est la mise en place d’un amortissement fiscal forfaitaire annuel du bien pour les logements loués en longue durée. Le pourcentage d’amortissement serait fixé à :
5 % par an de la valeur pour un logement neuf ;
4 % pour un logement ancien, sous condition de travaux représentant 15 % de la valeur du bien.
Dans un souci de simplicité, l’amortissement serait forfaitaire, sur la base de la valeur du bien hors foncier, augmentée des éventuels travaux. Ceci exclurait la nécessité d’une immatriculation SIREN et de recours à une liasse fiscale, comme c’est le cas pour la location meublée.
Afin d’inciter à la détention de longue durée, les amortissements ne seraient pas réintégrés dans le calcul de l’assiette de l’imposition sur la plus-value de cession, ce qui pourrait conférer un avantage fiscal significatif aux locations nues par rapport aux locations meublées.
Le second projet concerne le régime micro-foncier et consisterait à hausser à 50 % (au lieu de 30 % aujourd’hui) le plafond d’abattement pour les locations nues, dans la limite d’un plafond de 30 000 € (au lieu de 15 000 € aujourd’hui).
La deuxième proposition se situe dans le prolongement de la première, puisqu’elle préconise de mettre en place un bonus d’amortissement de 0,5 à 1,5 % pour les biens loués avec un loyer abordable, selon le segment intermédiaire (amortissement de respectivement 5,5 % et 4,5 % dans le neuf et l’ancien), social (amortissement de respectivement 6 % et 5 % dans le neuf et l’ancien) ou très social (amortissement de respectivement 6.5% et 5,5 % dans le neuf et l’ancien) et, pour le régime micro-foncier, un bonus d’abattement de 5 à 15 % pour les biens loués avec un loyer abordable, selon le segment intermédiaire (abattement de 55 %), social (abattement de 60 %) ou très social (abattement de 65 %).
Proposition n°3
La troisième proposition suggère de rehausser le plafond d’imputation du déficit foncier sur le revenu global à 40 000 € (contre 10 700€ aujourd’hui ou 21.400 € en cas de travaux de rénovation de « passoire thermique »).
Cette proposition pourrait s’avérer, toutefois, contre-productive dans la mesure où les travaux imputés sur le revenu global ne peuvent plus être imputés sur les revenus fonciers. Or, le revenu global est imposé au barème progressif de l’impôt sur le revenu, alors que les revenus fonciers sont imposés au barème progressif de l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux au taux de 17,2%. L’augmentation du plafond d’imputation sur le revenu global diminuerait le montant des travaux imputable sur le revenus fonciers et limiterait le gain fiscal pour le contribuable.
Proposition n°4
La quatrième proposition entend supprimer de l’assiette de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), les biens loués en location de longue durée. Le rapport n’est pas très clair sur l’étendue de la succession, car il traite indistinctement des biens affectés à la résidence principale et des biens loués en location longue durée.
Une telle réforme mériterait de poser la question de la pertinence du maintien de l’IFI. En effet, si l’on ajoute l’exonération des biens loués en location de longue durée, l’exonération de l’actif immobilier professionnel, l’abattement de 30% de la résidence principale, l’assiette imposable de l’IFI pourrait être réduite à peau de chagrin.
Proposition n°5
Enfin par la dernière proposition, le rapport souffle au Gouvernement de réduire l’exonération totale d’imposition (impôt sur le revenu et prélèvements sociaux) après une détention de 20 ans. Aujourd’hui, l’exonération n’est totale qu’après une durée de détention de 22 ans, en matière d’impôt sur le revenu et de 30 ans, en matière de prélèvements sociaux.
Ce nouveau cadre fiscal ne concernerait que les transactions intervenant à compter de décembre 2025. Selon les auteurs, il pourrait provoquer des investissements supplémentaires évalués à environ 90 000 logements. Les effets positifs de la réforme sur la production de logements neufs mais aussi sur la réalisation de travaux, notamment de rénovation énergétique, dans le parc existant, permettraient la création d’emplois dans la filière, estimé par le rapport à plus de 100 000 emplois créés à horizon 2030, générant plus de 1 Md€ de recettes de cotisations sociales.
Ces lendemains qui chantent risquent, néanmoins, d’être vite oubliés en cas d’instabilité gouvernementale.