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Le mandat exclusif et la clause pénale, outils de protection de l’agent immobilier

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En ces temps d’agitation autour du mandat exclusif et de la clause pénale, voici quelques jurisprudences récentes faisant application de ces stipulations au bénéfice de l’agent immobilier.

photo : Sans titre

Dans sa rédaction actuelle, la loi Hoguet et son décret d’application valident tout aussi bien le mandat exclusif que le Mandat simple et permettent d’assortir le mandat d’une clause pénale destinée à protéger l’agent immobilier des agissements indélicats de son mandant. Avant d’exposer les décisions récentes illustrant ces principes, rappelons brièvement la réglementation en vigueur.

Les règles actuelles

La législation autorise le mandat exclusif, bien entendu. La clause d’exclusivité interdit au mandant de négocier la vente sans l’intermédiaire du mandataire pendant la durée du mandat. La législation permet également d’assortir le mandat D’une clause aux termes de laquelle une commission sera due par le mandant, même si l’opération est conclue sans les soins de l’intermédiaire. Enfin, il est possible d’assortir le mandat d’une clause pénale, à moins qu’il ne s’agisse d’un mandat de recherche portant sur un bien non identifié. La clause pénale est une évaluation forfaitaire de dommages-Intérêts, qui s’applique en cas de faute du mandant. Cependant, le juge conserve la faculté de modérer ou d’augmenter la peine ainsi convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Pour être valables, la clause d’exclusivité, comme la clause pénale, doivent faire l’objet d’une stipulation expresse du mandat, dont un exemplaire a été remis au mandant. La clause doit être mentionnée en caractères très apparents. Elle doit donc se détacher du corps général du mandat. Le mandat comportant une  telle clause peut être dénoncé à tout moment, passé un délai de trois mois à compter de sa signature. La partie qui souhaite mettre fi n au mandat doit aviser l’autre partie par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, quinze jours au moins à l’avance. Cependant, ces dispositions ne s’appliquent pas dans les trois cas suivants, lorsque le mandat est conclu en vue de :

  • • La vente d’immeuble par lots,
  • • La souscription ou la première cession d’actions ou de parts de société immobilière donnant vocation à une attribution  de locaux en jouissance ou en propriété,
  • • La location, par fractions, de tout ou partie des locaux à usage commercial dépendant d’un même ensemble commercial.
    Le mandat doit néanmoins préciser, dans ces hypothèses, les cas et conditions dans lesquels il peut être dénoncé avant sa complète exécution, lorsque l’opération porte en totalité sur un immeuble déjà achevé. Articles 76 et 78 du décret du 20 juillet 1972 Article 1152 du Code civil
Mandat exclusif et protection de l’agent immobilier

Un arrêt récent de la cour d’appel de Paris permet d’il- lustrer l’intérêt que présente  pour l’agent immobilier le mandat exclusif. En l’espèce, les vendeurs avaient dénoncé le mandat de l’agent immobilier, en respectant le préavis de quinze jours prévu par la loi comme par le mandat. Et, le lendemain du terme du préavis, le mandat ayant pris fin, ils ont signé une promesse de vente avec un acquéreur, chez un notaire. Or, la clause pénale du mandat précisait que les mandants s’interdisaient de négocier directement ou indirectement pendant la oidurée du mandat. Les mandants devaient diriger tout candidat acquéreur vers l’agent immobilier titulaire du mandat exclusif. Les juges de la Cour d’appel de Paris ont considéré que l’accord entre les parties avait nécessairement eu lieu avant l’expiration du mandat exclusif de vente. Les vendeurs avaient ainsi commis une faute contractuelle. La clause pénale prévoyant le paiement d’une indemnité représentant 5 % du prix de vente, soit 79 000 €, leur était donc  applicable. Cependant, les juges ont considéré que ce montant était manifestement excessif et l’ont réduit à 20 000 €. Un mandat simple, ou un mandat « semi-exclusif », qui permet au mandant de traiter directement l’opération pendant toute la période d’exclusivité, n’aurait pas permis à l’agence d’obtenir une quelconque indemnisation, le mandant conservant, par essence, le droit de commercialiser son bien par lui-même. CA Paris, 1er septembre 2011

Clause pénale et protection de l’agent immobilier

La clause pénale constitue une protection intéressante pour l’agent immobilier. Par deux décisions toute récentes, la  cour de cassation confirme une position déjà établie. En effet, pour se protéger, l’agent immobilier a la faculté  d’introduire dans le mandat une clause interdisant au mandant de traiter, par un autre intermédiaire, avec un acquéreur présenté par l’agent immobilier ou ayant visité les locaux avec lui. La jurisprudence a ad- mis la validité de cette clause, qu’elle figure dans un mandat simple ou dans un mandat exclusif. Le mandat peut préciser, de plus, que cette interdiction perdurera après la fin du mandat. Deux arrêts du mois d’octobre 2011 viennent consolider cette jurisprudence. Les clauses, contenues dans des mandats simples, étaient relativement proches :

• La première précisait que « pendant le cours du présent mandat et de ses renouvellements, ainsi que dans les
18 mois suivant l’expiration ou la résiliation de celui-ci, le mandant s’interdit de traiter directement ou par l’intermédiaire d’un autre mandataire avec un acheteur à qui le bien aurait été présenté par le mandataire ou un mandataire substitué. A défaut de respecter cette clause, le mandataire aurait droit à une indemnité forfaitaire, à la charge du  mandant, dont le montant serait égal à celui de la rémunération toutes taxes comprises du mandataire prévue au  présent mandat ». • La seconde indiquait que « pendant le cours du présent mandat et de ses renouvellements ainsi que dans les douze mois suivant l’expiration ou la résiliation de celui-ci, le mandant s’interdit de traiter directement ou par l’intermédiaire d’un autre mandataire avec un acheteur présenté à lui par le mandataire ou un mandataire substitué ». Dans les deux espèces, la Cour de cassation a précisé que les clauses contenues dans les mandats étaient stipulées en des termes clairs et précis. En l’état actuel de la législation, ces clauses ont donc vocation à s’appliquer. Rappelons cependant que leur durée doit être fixée de façon raisonnable. À défaut, elles pourraient être regardées comme abusives, et réputées non écrites. Dans les deux espèces citées, la durée de l’interdiction est fixée,
respectivement, à 12 et à 18 mois après le terme du mandat. Dans un arrêt antérieur, la Cour de cassation a considéré qu’une clause fixant ce délai à 24 mois n’était pas abusive, et ne créait aucun déséquilibre dans les droits et obligations des parties, au motif que les droits du propriétaire n’étaient limités qu’à l’égard des personnes qui ont été présentées par le mandataire et qu’une telle restriction est justifiée par le risque de fraude très important. Cass. Civ. 3, 6 et 20 octobre 2011 Cass. Civ. 1, 2 octobre 2007.

 

LES CONTOURS FLOUS DE L’OBLIGATION DE VÉRIFICATION DE L’ÉTAT DE L’IMMEUBLE

Au fil des dernières décisions rendues en la matière, il est toujours aussi délicat de fixer les limites des obligations de l’agent immobilier quant à l’état de l’immeuble objet du mandat. La cour d’appel de Bordeaux a récemment rappelé que « si l’agent immobilier a à sa charge un devoir de renseignement au profit de l’acquéreur de l’immeuble dont il a négocié la vente, il ne lui incombe cependant pas de se substituer au rôle d’un expert en construction », à propos d’une charpente peu accessible. La Cour de cassation a considéré que la cour d’appel de Versailles avait pu retenir la responsabilité de l’agent immobilier pour ne pas avoir attiré l’attention des acquéreurs sur les « affaissements l’amplitude décimétrique » de la toiture et n’avoir procédé à aucun contrôle relatif au bien. L’agent immobilier avait donc manqué à son obligation d’information et de conseil. Plus récemment la cour de cassation a censuré la cour d’appel de Besançon, qui avait énoncé « qu’il n’entre pas dans la mission d’un agent immobilier de vérifier au-delà de l’apparence » une toiture d’ardoise neuve sur un château, alors même qu’il a été avéré par la suite que la charpente était affectée de vices. L’expert avait dû, pour réaliser sa mission, « accéder à la toiture en passant par les fenêtres pour constater des réparations de fortune ». Il faudra donc attendre la décision de la Cour d’appel de renvoi, afin de savoir si la motivation de la cour d’appel de Besançon était insuffisante pour écarter la responsabilité de l’agent immobilier, ou si, au contraire, la responsabilité de l’agent immobilier est retenue pour manquement à son obligation de vérification du bien vendu, et d’information de l’acquéreur. CA Bordeaux, 12 septembre 2011 Cass. Civ. 3, 7 septembre 2011 Cass. Civ. 3, 3 novembre 2011

 

 

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