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« La déflation immobilière, urgence économique ou programme politique? », François Moerlen, Fondateur de Locagestion

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photo : François Moerlen, Fondateur de Locagestion

Qu’on se le dise: le prix du logement en France est trop élevé.

Les médias sont à l’affut, les politiques sont à l’action: le niveau des prix de l’immobilier en France, serait si important qu’il pèserait sur la compétitivité de l’économie, serait source d’injustice au profit des propriétaires, capterait l’essentiel de l’épargne aux dépens de l’investissement dans le capital des entreprises. Rien de moins.

D’ailleurs les chiffres sont implacables: les prix de vente ont doublé en 10 ans, les loyers des grandes villes seraient prohibitifs et la nécessité de logements neufs à construire serait, conformément aux objectifs politiques du moment, de 500 000 logements pas an. De quoi entretenir la flambée des prix.

Fort de ce constat, on ne peut que comprendre nos élus, de droite comme de gauche,qui ont fait de la déflation immobilière un programme politique commun.

La loi ALUR, dont la plus part des articles visent à faire pression sur les prix, fait l’unanimité chez les parlementaires: encadrement des loyers par décision préfectorale, préavis réduits, contraintes accrues sur les bailleurs sont autant de mesures déflationnistes.

Mais le propre des mécaniques de déflation, c’est de créer l’attentisme.  Pourquoi acheter aujourd’hui puisque j’achèterai moins cher demain? Pourquoi vendre maintenant, puisque les prix sont bas?

La déflation, en immobilier, est un processus long et progressif, si l’on s’en réfère à l’expérience de l’Espagne, où la baisse des prix n’a jamais excédé 5% par an, dans un marché largement en sur-offre.

Que pouvons nous attendre d’une déflation immobilière programmée en France?

La particularité de la France est l’hyper-centralisme de l’économie à Paris et dans quelques métropoles régionales.

La loi, en instituant un marché à deux vitesses (entre zones tendues et zones non tendues) va en premier lieu favoriser la clientèle aisée dans les grandes villes, en diminuant le coût de leurs logements, mais va aussi pénaliser l’installation des plus modestes dont la solvabilité est plus fragile.

Si les prix diminuent dans les zones tendues, il paraît certain que ceux des communes limitrophes seront également sous pression, d’autant que les conditions de location y seront plus contraignantes (préavis de trois mois, loyer libre).

L’effet domino jouera jusqu’au bout de la chaîne, ce qui laisse augurer un avenir bien sombre pour l’immobilier rural et les petites communes, dont on peut s’interroger dès à présent sur la pérennité du bâti, dès lors qu’il n’aurait pas une valeur intrinsèque suffisante.

On peut donc constater un attentisme des vendeurs dans les grandes villes, et un affaissement très progressif des prix en régions, en fonction de l’éloignement des centres économiques.

Le marché de la construction neuve peut il apporter la solution?

Les statistiques parlent d’elles même: non seulement les ventes de logement neuf ont atteint un plancher historique en 2013, mais de surcroit, les demandes de permis de construire sont à nouveau à la baisse en 2014.

Les causes sont simples:

– les investisseurs, qui représentaient 65% du marché ont déserté, malgré l’attrait évident du dispositif Duflot. Les CSP +, qui formaient le gros de leurs bataillons, sont sous pression de Bercy depuis plusieurs années, et à présent sous celle du ministère du logement.

– Pourquoi investiraient-ils dans la pierre dans ces conditions?

– les primo accédant souffrent des effets de la crise, et sont sous la pression des banques qui exigent à présent un apport consistant, anticipant elles mêmes un risque lié à la déflation des bien qu’elles financent!

Il ne faut donc pas attendre un choc d’offre du côté du marché du neuf.

Le logement social, clé de toutes les batailles?

Les politiques n’en font pas mystère. Il n’est point de salut en dehors de la construction de logement sociaux. Ils représentent pourtant déjà 45% du parc locatif.

Mais là encore, il faut que l’offre rencontre la demande. Car, évidemment, ce sont dans les grands pôles urbains qu’elle se trouve. Dans les zones péri-urbaines et rurales, nombre de logements sociaux sont vacants, faute d’avoir trouvé preneur.

C’est ainsi que l’un des enjeux majeurs des prochaines élections locales de 2014, constituera à donner mandat (ou pas) à nos élus locaux pour préempter des bâtiments et des logements de centre ville, pour les transformer en logements sociaux. Pour exemple, Paris a déjà procédé au rachat de plus de 400 immeubles dans la capitale, dont certains sur la prestigieuse avenue Foch.

Mais on peut dores et déjà s’interroger sur les capacités financière d’une puissance publique sur-endettée, pour mener à bien des opérations d’investissement et de rénovation sur des immeubles bâtis haut de gamme.

A moins que la baisse des prix de l’immobilier vienne au secours de sont principal instigateur : la puissance publique.

En obligeant les propriétaires à vendre sous le poids des taxes et des règlementations dans un marché déprimé, elle lui permettrait de mettre la main à bon compte, sur la plus importante richesse de notre pays: la pierre. © LeFildeLimmo/BazikPress

 

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